Page:Eckermann - Conversations de Goethe, t2, trad. Délerot.djvu/511

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puissante mais massive, sans formes caractéristiques, est organisée moins pour saisir que pour écraser ; les conduits palatins sont larges et ouverts ; il n’y a point la moindre trace de suture ; l’esprit peut cependant en désigner la place. Le morse (trichecus rosmarus) offre un grand intérêt. Les dents canines très-prononcées forcent l’intermaxillaire à reculer, et cette créature si repoussante présente ainsi une certaine ressemblance avec l’homme. Dans le premier exemple, appartenant à un individu adulte, on voit nettement l’os intermaxillaire séparé, et on peut remarquer comment sa racine, partant de la mâchoire supérieure, et croissant toujours, a formé une espèce de gonflement sur la paroi de la joue. Les autres figures sont copiées de grandeur naturelle sur un jeune sujet. L’os intermaxillaire est parfaitement séparé de la mâchoire supérieure, et la dent incisive reste parfaitement fixée dans son alvéole appartenant à la mâchoire supérieure.

Après ces exemples, nous soutiendrons hardiment que la défense de l’éléphant a aussi sa racine dans la région du maxillaire supérieur ; seulement ici l’os intermaxillaire vient aider la mâchoire supérieure, et, sans former l’immense alvéole, lui fournit au moins une lamelle qui la rend plus forte. C’est là ce que l’examen d’un grand nombre de sujets divers nous fait croire, quoique nous ne puissions trouver aucun exemple décisif dans les crânes reproduits. Mais c’est ici que le génie de l’analogie, comme un ange gardien, doit veiller à nos côtés, pour nous empêcher de méconnaître dans un cas douteux une loi à laquelle nous devons rendre hommage, même lorsqu’elle ne se manifeste pas avec une pleine évidence.

Nous voyons enfin en regard le singe et l’homme. On apercevra maintenant dans la mâchoire de l’homme l’os intermaxillaire séparé et uni. Peut-être aurait-il fallu donner ici des figures plus complètes et plus variées, mais, dans la période qui pouvait être la plus féconde, l’intérêt que je ressentais pour cette branche particulière d’études cessa pour moi, et nous devons déjà être très-reconnaissant qu’une digne société de naturalistes ait bien voulu honorer ces fragments de son attention et conserver ces souvenirs de recherches consciencieuses dans le recueil inaltérable de ses actes.

Nous prions le lecteur de nous suivre encore sur un autre point, car M. Geoffroy Saint-Hilaire nous oblige à examiner un second organe.