Page:Eekhoud - Kermesses, 1884.djvu/194

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mettaient le poing sous le nez. Le père les avait soûlés durant l’après-midi, leur haleine les trahissait. Il se trouva que tous trois s’étaient débarrassés de leurs sarraux.

Ces provocations manifestes vainquirent le calme de Marcus.

— Au large ! les mains ne sont pas de la partie ! commanda l’intrépide. Au large, vous dis-je ! Et comme les brutes le bousculaient, il s’arma d’un fermoir, puisé dans son assortiment, et en balafra la joue de cet enflé de Pauw qui venait de le saisir par le bras. La vue du sang acheva de les affoler. Ils se ruèrent, épileptiques, débagoulant l’injure.

— Tapez dessus, les garçons ! hurla le vieux Mollendraf, s’oubliant comme eux.

En un instant, la table culbuta, la chandelle s’éteignit ; éventré, le fameux cruchon de Schiedam se vida sur la dalle, les verres volèrent en éclats et Mark, harpé par les trois batailleurs, roula par terre.

Véva accourait a ce hourvari.

— Marcus, s’écria-t-elle ! Och God ! que va-t-il arriver.

Fourtt, la Judase ! clama son amant, l’accouplant au traître des traîtres.

— Ne t’en mêle pas ; laisse nous faire ! Il la dansera ! marmonna le vieux à l’oreille de Véva.

Cependant, les coups pleuvaient sur la carcasse du franc gars. Il les rendit aussi longtemps qu’il put. On entendait les respirations pénibles des poitrines comprimées, pressées l’une contre l’autre, des cris rauques,