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LES FUSILLÉS DE MALINES

probation platonique, mais rencontraient une résistance inattendue dans tous les rangs de la population.

Nul ne se faisait inscrire sur les rôles. Inquiétés par les recruteurs, les fils de famille passèrent en Angleterre, les pauvres diables fuirent aux halliers. De véritables campements de bagaudes se formaient dans la Campine et le Pays de Waes. D’abord les conscrits se contentèrent de refuser le service et de dépister leurs traqueurs ; c’étaient des réfractaires et pas encore des insurgés. Lorsque les rabatteurs s’éloignaient, les fugitifs, avertis par leurs parents, quittaient leurs cachettes, regagnaient leurs toits et reprenaient leur métier, quitte à disparaître à la première alerte.

Aucune rencontre n’avait encore eu lieu entre paysans et limiers Jacobins. Mais on prévoyait que cette partie de cache-cache ne durerait pas, et que la collision était prochaine. Ces feintes et ces refuites, cette fastidieuse randonnée, ces défis réciproques ne pouvaient guère se prolonger. Le malaise, la tension augmentait de part et