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Quant à Izanagi, devenu veuf par l’affolement de sa femme, il ne pouvait se résoudre à son abandon. Saisi de fureur à l'aspect de ce fils maudit, cause cependant innocente d’une séparation qui lui était à charge, il le pourfendit de sa lame et le coupa séance tenante en trois morceaux qui, se transformant d’eux-mêmes, s’imposèrent aussitôt comme les dieux des Montagnes, de la Foudre et de la Pluie. Cela fait, il descendit dans les sphères de la Nuit, nourrissant encore le vain espoir de ramener sa fugitive épouse. Mais, comme celle-ci, à l’instar de Proserpine, avait goûté des mets à elle offerts par le dieu Yomi, elle devait demeurer au pouvoir de ce dernier. Néanmoins elle promit à son époux d’implorer sa liberté du Pluton japonais, sous la condition expresse qu’il ne chercherait pas à la revoir avant qu’elle ne l’eut obtenue. Yomi avait généreusement accédé à ce désir, quand Izanagi, enfreignant une clause à laquelle il avait consenti, eut aussitôt l’horrible douleur de voir sa femme tomber en putréfaction sous ses regards. Ne croirait-on pas relire la légende mythologique d’Orphée et d’Eurydice, chantée par les poètes de l’antiquité ?

Mais, Izanagi ne devait pas, en fin de cause, subir le sort épouvantable du Chantre de Thrace, entouré et déchiqueté par les prêtresses de Bacchus ; il devait, au contraire, poursuivre dans une sorte d’hermaphrodisme, le cours de ses procréations multiples.