savant historien, Jules Lippert : « On aurait dit que la nature voulait tout à coup se dévoiler entière et, à mesure qu’on apprenait à la mieux connaître, les inventions se succédaient. » Et ce n’est pas du tout par hasard que l’époque des plus grands progrès scientifiques a été aussi celle du triomphe imprévu de la « technologie humaine », car l’art et la science ont leur mère commune dans les connaissances naturelles.
Vous voyez donc quel espace de temps immense, des milliers d’années, s’est écoulé depuis les débuts l’art d’écrire et la reproduction rapide et illimitée des œuvres manuscrites, au moyen des caractères mobiles, et la série de progrès de toute nature qui en a été la conséquence. Car, tandis qu’autrefois l’on était obligé d’avoir toujours recours à la copie manuscrite, procédé peu commode, prenant du temps, dispendieux et ne permettant qu’à un nombre très limité d’individus de pouvoir acquérir les trésors de la science, ceux-ci peuvent dès lors, grâce à cet « art noir » si diffamé, pénétrer la masse du peuple, inculquant à notre race cette nouvelle manière d’envisager les choses à un point de vue naturel et abandonnant les anciennes idées fantaisistes et surnaturelles. Qui aurait cru, il y a seulement quelque dix ans, à la possibilité de transmettre nos pensées, avec la rapidité de l’éclair, aux points les plus éloignés ? Nous désignons cela maintenant par le mot télégraphier (écrire au loin) et téléphoner (parler au loin). Ce dernier art a, il est vrai aujourd’hui encore, un domaine plus limité que la télégraphie, mais néanmoins, il a pris, depuis l’emploi des fils de bronze, un développement que l’on n’aurait jamais soupçonné.
Quels énormes changements ces deux inventions n’ont-elles pas apportés dans le domaine artistique ! On peut dire qu’elles ont révolutionné le monde par le triomphe de l’espace et du temps.
Oui, notre génération blasée, parce qu’elle ne veut plus se reporter à cette époque primitive où les chemins de fer étaient encore inconnus, ne possède plus le sentiment exact de la grandeur et de la valeur du présent comparativement au quasi-néant des siècles précédents. Elle ne connaît pas les nombreuses imperfections du passé, pas plus que nos