Page:Einstein - L'Internacia, trad. Demonget, 1889.djvu/37

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verbe faire de trois façons différentes : mekœn (l’allemand machen), dunœn (l’allemand thun) et enfin duinœn (l’allemand leisten). Si nous considérons combien d’idées analogues l’allemand attribue au mot « thun », l’anglais à son « to get », le français à son « mettre », que le Dr Esperanto rend par meti, nous devons poser comme premier principe, pour le choix de synonymes, dans une langue universelle, celui-ci : Choisir d’abord l’expression la plus usitée et l’enchaînement des idées, indiquera déjà avec quelle expression spéciale celle-ci devra être chaque fois rendue dans la langue nationale correspondante.

Mais revenons-en à nos moutons. Le sens est absolument le même, par exemple, lorsque la Bible hébraïque dit d’Ève qu’elle a pris, au lieu de cueilli le fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal. Si, donc, l’on ne trouve pas dans le dictionnaire d’Esperanto le mot cueillir, on n’a qu’à se contenter du mot prendre, mais si l’on tient absolument au mot cueillir rien n’est plus facile que de le former soi-même de shir : arracher, que l’on fera suivre de la syllabe affaiblissante et, ce qui fera shireti, cueillir. Mais je crois qu’il est en général inopportun, en matière de langue universelle, de faire preuve d’une telle minutie, car il faut éviter ici tout ce qui est inutile, contrairement aux langues naturelles où l’on rencontre trop souvent excès de mots d’un côté, pauvreté de l’autre.

Du reste, les mots universels du Dr Esperanto suffisent pleinement aux besoins ; je reconnais néanmoins qu’il faut faire preuve d’une certaine perspicacité et d’une certaine habileté pour combiner les mots entre eux et pouvoir internationaliser soi-même tel ou tel mot. Soit dit en passant, le plena vortaro, dictionnaire complet, du Dr Esperanto qui a paru avec la traduction russe paraîtra sous peu aussi en allemand, en français et en anglais et viendra ainsi en aide aux esprits moins doués. Dans la Bible, qui en général est encore très pauvre de mots, bien qu’elle le soit davantage que nos langues modernes, pour exprimer les idées religieuses, isch et ischah signifient homme et femme comme il est dit au passage Gen. 7, 2 : « De tout le bétail sain, tu en prendras sept sept. » La répétition du nombre indique ici l’idée de « paire » ; en outre, le nom ischah