Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/154

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grande Bourrache se moquaient de lui à tue-tête parce qu’il ne leur avait point cédé.

Un beau soir, il se décida et rejoignit la Bourrache dans les paillers d’Izacar, qui sont accotés au mur du cimetière. Il l’a choisie parce qu’elle ne porte point le petit bonnet Vendéen, ni ces corsages étriqués qui brident la poitrine. Elle a les cheveux libres, sans résille, et les seins à l’aise sous un caraco de couleur. Vigoureuse et chaude, sentant la brume et le poisson, elle garde le cou nu, bien que les nuits soient fraîches, et le gars retrouvait la Gaude dans l’insolence de ces allures et de cette santé.

Devant eux, de l’autre côté du jardin, le pignon blanc de la maison du mareyeur s’éclairait dans la nuit à chaque tour du phare. Niché au creux d’une meule, les yeux bien en face de ces éclats rapides qui passaient de vingt secondes en vingt secondes et venaient du Pilier, Jean-Baptiste s’abandonnait à la ronde des souvenirs. Les branches tortes d’un pommier grimaçaient parfois des ombres dans un coup de vent sur le mur clair ; de la paille courait sur l’aire avec un frottement soyeux ; et la mer bruissait doucement aux oreilles comme dans un coquillage.

Jean-Baptiste revenait quotidiennement à ces rendez-vous, chercher dans ces possessions de hasard la seule femme qu’il désirait. On ne le voyait