Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/28

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les ponts brûlants qui buvaient et ternissaient. On entendait les seaux tomber à la mer et l’eau ruisseler le long des coques.

Pendant que Théodore amarrait la yole, les hommes filèrent droit chez Cônard qui tient un débit sur la place d’Armes, à côté de Malchaussé, le charpentier, dont la chèvre demeure à longueur d’année sur la rue, en compagnie du bois en bille.

Dans la salle basse aux solives criblées de chiures de mouches sous lesquelles jaunissaient les almanach Cointreau et « La loi tendant à réprimer l’ivresse publique », un gars à Piron, en vareuse de l’État, avec le béret au nom glorieux de Marseillaise, fêtait son congé aux frais de Beaulieu, patron des Douanes. Ils s’alignèrent à leur suite, au bord de la table massive, et Double Nerf commanda le Picon qu’ils regardèrent servir avec recueillement.

Et seulement après la trinquée d’usage et la première lampée, les rites étant accomplis, ils parlèrent.

— C’est égal ! avoua Perchais, c’est une belle barque !

— Hein ! vous avez vu ça ! appuya Beaulieu.

Du coup Double Nerf lâcha la Gaude dont s’empara le gars Piron.

— Oui, dit-il, et que je l’voudrais sur les roches, la quille en l’air, le sloop à Coët.