Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/244

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que dans aucune circonstance je n’aurais donné à personne le droit de prétendre que je recherchais la fortune, sous prétexte de chercher… autre chose. Il n’y avait pas besoin d’autre sauvegarde contre moi. La fortune en était une suffisante.

Will se leva en prononçant ces derniers mots, et se mit à marcher, sans savoir de quel côté de la chambre il allait ; il s’approcha ainsi de l’embrasure d’une fenêtre voisine ; c’était auprès de cette fenêtre, ouverte aujourd’hui comme elle l’était alors, qu’ils étaient restés tous deux, Dorothée et lui, à causer ensemble un an auparavant, à peu près à la même époque. Tout son cœur applaudissait à l’indignation de Will ; elle n’avait qu’un désir, le convaincre qu’elle ne lui avait jamais fait tort ; et il semblait s’être détourné d’elle, comme si elle aussi faisait partie de ce monde inhospitalier.

Il serait très cruel à vous de supposer que je vous aie jamais attribué aucune intention basse, commença-t-elle.

Puis, avec sa chaleur naturelle, désirant plaider sa cause auprès de lui, elle se leva et vint se mettre devant lui, près de la fenêtre, sa place d’autrefois :

— Pouvez-vous penser que j’aie jamais cessé de croire en vous ?

Will, la voyant là, tressaillit et se recula de la fenêtre en évitant son regard. Dorothée fut froissée de ce mouvement qu’elle attribua au même sentiment qui avait tout à l’heure inspiré sa colère. Elle était prête à lui dire que tout cela était aussi pénible pour elle que pour lui, et qu’elle était impuissante à y rien faire ; mais ces étranges particularités de leurs rapports, qu’aucun d’eux ne pouvait librement expliquer, la retenaient toujours par la crainte d’en trop dire. En cet instant, elle ne croyait pas que dans aucune circonstance Will eût souhaité de l’épouser, et elle craignait de laisser échapper une parole qui aurait pu le laisser enten-