Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/388

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à l’étranger, dit mistress Sprague. C’est ce qu’on fait généralement, quand il y a quelque chose de déshonorant dans une famille.

— Et ce sera pour Henriette un coup mortel, ajouta mistress Plymdale. Si jamais femme aura été anéantie par la douleur, ce sera elle. Je la plains de tout mon cœur. Et malgré toutes ses erreurs, il y a peu de femmes meilleures. Toute petite fille, elle avait déjà les manières les plus correctes, et elle a toujours eu bon cœur, elle était franche comme le jour. Vous pouviez regarder dans ses tiroirs, tant que vous vouliez, toujours de même. Et c’est ainsi qu’elle a élevé Kate et Hélène. Vous pouvez vous imaginer combien il lui sera dur d’aller vivre au milieu d’étrangers.

— Le docteur dit que c’est ce qu’il engagerait les Lydgate à faire, répéta mistress Sprague. Il trouve que Lydgate aurait dû rester avec les Français.

— Cela lui irait assez bien, à elle, il me semble, dit mistress Plymdale, avec la frivolité de son caractère. Mais c’est de sa mère qu’elle l’a prise ; ce n’est pas de sa tante Bulstrode, qui lui a toujours donné de bons conseils, et qui, d’après ce que j’en sais, eût préféré lui voir faire un autre mariage.

Mistress Plymdale était dans une situation de nature à causer quelque complexité dans ses sentiments. Non seulement son intimité avec mistress Bulstrode, mais encore de fructueux rapports d’affaires de la grande maison de teinturerie Plymdale avec M. Bulstrode, la portaient d’un côté à souhaiter que la connaissance de la vérité fût favorable à la conduite du banquier, mais d’un autre côté elle n’en craignait que davantage d’avoir l’air de pallier sa culpabilité. Et puis, la récente alliance de sa famille avec les Toller l’avait, à sa grande satisfaction, mise en relations avec le meilleur cercle de la ville. La conscience de cette petite femme rigide était quelque peu troublée parla combinaison