Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/494

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dans la bonne voie. Il va venir tout à l’heure, aussi voulais-je vous en instruire d’abord parce que je pense que vous aimeriez à le lui dire vous-même. Après quoi je pourrai en discuter avec lui tout à mon aise et nous aborderons les questions d’affaires et tout ce qui s’ensuit.

— Oh ! mon cher bon père ! s’écria Mary lui passant les mains autour du cou, tandis qu’il baissait placidement la tête, disposé à se laisser caresser. Je me demande s’il existe aucune autre fille au monde qui trouve son père le meilleur homme de la terre.

— Laissez donc, mon enfant, vous trouverez votre mari meilleur.

— Impossible, dit Mary reprenant son ton habituel. Les maris sont une classe d’hommes inférieure, qui ont besoin qu’on les maintienne dans la bonne voie.

Lorsqu’ils rentrèrent à la maison avec Letty qui avait couru pour les rejoindre, Mary vit Fred à la porte du verger et alla à sa rencontre.

— Quels beaux habits vous portez, jeune homme extravagant dit Mary, comme Fred s’arrêtait et levait son chapeau devant elle d’un air de cérémonie comique. Est-ce là une manière d’apprendre l’économie ?

— Oh ! voilà qui est trop fort, Mary, dit Fred. Veuillez seulement regarder de près ces parements d’habit ! Ce n’est qu’à force de bons coups de brosse que j’ai un air honorable. J’ai trois habits en réserve, dont l’un comme habit de noces.

— Comme vous serez drôle ! Vous aurez l’air de sortir d’un vieux journal de mode.

— Non, du tout, ils se garderont bien deux ans.

— Deux ans ! Soyez raisonnable, Fred, dit Mary en se retournant pour faire quelques pas. Ne nourrissez pas d’espérances trop flatteuses.

— Pourquoi pas ? on vit mieux sur celles-là que sur