Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/82

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quelques conclusions justes sur les épreuves de sa vie. Il ne doutait pas qu’elle eût souffert de l’effort, de la lutte douloureuse qu’entraîne la contrainte de soi-même, et qu’elle ne fît maintenant que se sentir dans une autre espèce de prison, après celle dont elle venait d’être délivrée.

Sir James fut d’autant plus disposé à se ranger à l’avis de Lydgate, quand il apprit que Célia avait déjà fait part à Dorothée de la désagréable clause du testament. Il n’y avait plus de raison désormais pour retarder davantage l’exécution d’affaires urgentes ; et, le lendemain, sir James accéda à sa demande de la conduire à Lowick.

— Je n’ai, pour le moment, aucun désir d’y rester, dit Dorothée. C’est à peine si je pourrais le supporter. Je suis bien plus heureuse à Freshitt avec Célia. J’y serai mieux pour réfléchir à ce qu’il convient de faire à Lowick, en considérant les choses à distance. Je désire aussi rester un peu à la Grange avec mon oncle et me promener dans tous nos chemins d’autrefois, au milieu des gens du village.

— Pas encore, il me semble. Votre oncle reçoit beaucoup d’hommes politiques, et vous êtes mieux, éloignée de ces menées-là, dit sir James qui ne songeait pour le moment à la Grange que comme à un repaire hanté par le jeune Ladislaw.

Mais nulle parole ne fut échangée entre lui et Dorothée sur la partie reprochable du testament ; chacun d’eux, sans doute, sentant qu’il lui serait impossible d’en parler. Sir James était timide, même avec les hommes, quand il s’agissait de sujets désagréables ; et la seule chose que Dorothée eût voulu en dire lui était interdite, parce que c’eût été une nouvelle preuve de l’injustice de son mari. Elle voulait pourtant que sir James fût instruit de ce qui s’était passé entre elle et lui concernant les droits moraux de Will Ladislaw à la propriété. Alors, pensait-elle, il verrait clairement comme elle que cette clause étrange et indélicate avait