Page:Eliot - Silas Marner.djvu/126

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aussi ne pensait-il pas qu’il valût la peine de faire une remarque touchant la disparition de son fils et celle du cheval, Godfrey se répéta maintes et maintes fois que, s’il laissait échapper cette occasion favorable qu’il avait de tout avouer, il ne s’en présenterait peut-être jamais une autre : la révélation pourrait même se produire d’une façon plus odieuse que par la méchanceté de Dunstan, si l’autre venait elle-même comme elle en avait menacé Godfrey. Alors, pour se préparer à la scène qui aurait lieu, il essaya de se la représenter ; il arrêta dans son esprit comment il passerait de la confession de la faiblesse qu’il avait eue de donner l’argent à Dunstan, au fait que celui-ci le tenait si fermement, qu’il avait dû renoncer à lui faire lâcher prise, — comment, en outre, il agirait sur son père pour que celui-ci s’attendit à quelque chose de très grave avant de lui révéler la chose même. Le vieux squire était un homme implacable : il prenait des résolutions pendant une colère violente, et on ne parvenait pas à les lui faire abandonner, même après que sa colère était passée. Telles sont les matières embrasées des volcans, qui se durcissent et forment le roc en se refroidissant. Comme beaucoup d’hommes inflexibles et violents, il laissait le mal s’accroitre à la faveur de sa propre négligence, jusqu’à ce qu’il en fût assailli avec une force qui l’exaspérait. Il se retournait alors avec une rigueur farouche, et sa dureté devenait inexorable. C’était là son système avec ses fermiers ; il les laissait arriérer