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Page:Emery - Vierges en fleur, 1902.djvu/214

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VIERGES EN FLEUR

— Partez ! partez !…

— Il faudrait appeler à l’aide…

— Non… non… fuyez.

Mais Luce contemplait toujours cette mêlée. Elle aperçut soudain, dans un sursaut, le visage de la petite Bretonne, où rayonnait une joie immense, de l’extase. Alors, moins épouvantée, elle vit que les bras s’étreignaient doucement, que les bouches disjointes un instant se cherchaient.

Le prêtre était tremblant. Il regardait aussi. Ces amants très épris qui s’éperdaient, au ciel de leur tendresse, lui parurent hideux.

C’était cela, s’aimer ! se vautrer, se rouler se mordre, haleter ! Ah ! l’amour qu’il avait appelé dans ses rêves était si beau, si pur, si splendide !… Cela !… Le dégoût lui montait aux lèvres, en nausées. Et ses yeux effarés plongeaient dans le rocher ; il voulait se repaître de cette ignominie pour aimer désormais la virginité, et ne plus souhaiter l’ivresse de la chair.

Luce fermait les yeux maintenant ; mais elle voyait toujours l’expression radieuse d’infinie allégresse qui éclairait les traits de l’amante. Et le désir d’avoir, elle aussi, ce bonheur, lui tenaillait les nerfs, faisait battre son cœur.

Soudain, dans sa fureur et sa haine, le prêtre se baissa, prit une pierre et la lança. Mais il