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Page:Emery - Vierges en fleur, 1902.djvu/233

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VIERGES EN FLEUR

maintenir lié à la glu de sa chair ! Ah ! l’abbé, j’étais pris en effet, capturé, moi, l’oiseau nomade et vagabond, et j’allais pénétrer docilement dans la cage conjugale. Sauvé, je suis sauvé. Merci, mon Dieu, merci !

— Je crois que vous avez raison, et que les vierges sont d’adorables monstres, égoïstes et menteurs. Leur cœur n’est pas capable d’amour vrai et sincère : et nous sommes leurs dupes, leurs pantins, leurs jouets. Je vous avais conté les manèges de Luce : elle s’amusait à me leurrer, en faisant naître en moi une passion vive ; c’était sans doute aussi un manège intéressé. Oui, oui, je me souviens, elle me disait parfois : « Vous avez des parents très riches, jeunes hommes à marier ; ami, songez à moi ! » Je ne croyais pas qu’en parlant ainsi, elle m’invitait réellement à lui chercher un époux riche. Et pourtant c’était bien son désir : je comprends, maintenant.

— Qui donc vous a ouvert les yeux, l’abbé ? Qui donc vous a appris le mépris et la haine de ces filles hantées par la cupidité et les orgueils malsains, au lieu d’être possédées uniquement par l’amour, le bel amour splendide et rayonnant ?

— C’est vous, vous le briseur des vierges exécrables, des vierges qu’aujourd’hui je maudis avec vous.