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Page:Emery - Vierges en fleur, 1902.djvu/24

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VIERGES EN FLEUR

immense et infini que je sens en moi ; l’amour de tout ce qui est, des choses et des êtres ; l’amour des horizons vastes et des ciels bleus ; l’amour des chênes fiers et des humbles ajoncs qui vivent sur ces landes que nous traversons ; l’amour de l’océan, des vagues, des rochers ; l’amour de l’inconnu qui passe et qui me frôle ; l’amour du créateur qui nous donne la vie. Mais tous ces amours-là, qui donc nous les apprend ? C’est l’unique, le cher, l’initial amour qui naît en nous lorsque nos lèvres s’entrelacent aux lèvres de l’amante, et que nos bras la lient à nous ; l’amour qui nous emporte un instant dans le ciel !

— Taisez-vous, taisez-vous !

— Je ne suis pas le diable, pour que vous étendiez les mains et me repoussiez ainsi.

— Non, vous êtes la voix qui parle et vibre en moi ; la voix qui, dans mes nuits d’insomnie désolée, me crie qu’il faut aimer, aimer, aimer ! La voix qui, jusqu’au pied de l’autel, me poursuit et me dit que l’amour, c’est la raison de vivre !

— C’est la voix du doux Jésus de Nazareth qui disait aux hommes d’aimer, qui essuyait les larmes de la Magdeleine, qui sauvait la femme adultère ! Du Jésus, votre maître, dont les disciples criminels ont travesti la sainte doctrine.