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Page:Emery - Vierges en fleur, 1902.djvu/33

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VIERGES EN FLEUR

puis, fermant la portière au nez de l’abbé qui allait monter, il cria :

— Nous nous retrouverons à Tregastel… peut-être…

Et se tournant à demi vers la dame :

— Car on ne sait jamais si l’on parviendra au but que l’on s’est fixé. Les accidents de route sont fréquents…

— Oh ! pas sur cette ligne, fit la voyageuse en riant. Rassurez-vous, monsieur, vous ne déraillerez pas.

— Je déraille déjà… Oui, madame…

— Mademoiselle, si vous voulez bien…

— Mademoiselle, soit. Je disais qu’on ne sait jamais où l’on va. Où serons-nous, ce soir ?… J’allais à Tregastel…

— Eh bien ?

— Je n’y vais plus…

— Pourquoi ?… Oh ! pardonnez ma question indiscrète. Mais vous me faites parler malgré moi ; nous ne nous sommes jamais vus, et voilà que nous conversons comme si nous nous rencontrions dans un salon d’amis.

— Permettez que je me présente : Philbert Tavernier, trente ans, sans profession. Un désœuvré, diraient les imbéciles. Vaste erreur, car je sais très bien occuper mon temps.