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Page:Emile Littre - Etudes et glanures - Didier, 1880.djvu/461

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de la confiance en un retour de fortune, de l’activité en une réparation qu’il était du devoir de chacun d’entamer sans retard. Mes collaborateurs se montrèrent tout prêts. L’imprimerie accueillit de la copie avec satisfaction, et des ouvriers se retrouvèrent pour la composer. On avait ouvert chez M. Hachette celle de mes caisses qui était en exploitation lors de l’interruption. Tout y avait dormi de longs mois mais, comme dans le conte de Perrault, tout, copie en train, placards à demi corrigés et feuilles commencées, se réveilla en sursaut.

Les épreuves étaient envoyées non sans peine à Versailles, non sans peine renvoyées à Paris. Ma plus grande gêne provenait de ma séparation d’avec mon appareil lexicographique. Mais enfin cette gêne ne fut que passagère. L’insurrection succomba, et je revins à Paris, à mon œuvre, à mes livres et à toute mon installation. Dès lors l’impression marcha rapidement, et elle se termina en 1872, avec la fin de l’année. J’ai noté ci-dessus quelle joie intime j’éprouvai en 1865, quand j’écrivis le dernier feuillet de la refonte. Le dernier bon à tirer que je donnai en 1872 renouvela avec non moins de vivacité le sentiment d’un accomplissement obtenu par de grands efforts, après beaucoup d’années, en dépit de moments de vrai désespoir intérieur et de bien rudes traverses extérieures.

Ces derniers dix-huit mois (1871-1872) furent pour moi des mois chargés outre mesure et difficiles. Tous les arrangements de ma vie pour me procurer la plus grande somme de temps disponible étaient bouleversés. Membre de l’Assemblée nationale, j’assistais régulièrement à ses séances. N’ayant pu prendre résidence à Versailles à cause de mes livres