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Page:Emile Zola - L’Œuvre.djvu/217

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L’ŒUVRE.

duisait par une exaspération de toutes les heures.

Et c’en était fait, des joies premières de la campagne. Leur barque pourrie, défoncée, avait coulé au fond de la Seine. Du reste, ils n’avaient même plus l’idée de se servir du canot que les Faucheur mettaient à leur disposition. La rivière les ennuyait, une paresse leur était venue de ramer, ils répétaient sur certains coins délicieux des îles les exclamations enthousiastes d’autrefois, sans jamais être tentés d’y retourner voir. Même les promenades le long des berges avaient perdu de leur charme ; on y était grillé l’été, on s’y enrhumait l’hiver ; et, quant au plateau, à ces vastes terres plantées de pommiers qui dominaient le village, elles devenaient comme un pays lointain, quelque chose de trop reculé, pour qu’on eût la folie d’y risquer ses jambes. Leur maison aussi les irritait, cette caserne où il fallait manger dans le graillon de la cuisine, où leur chambre était le rendez-vous des quatre vents du ciel. Par un surcroît de malchance, la récolte des abricots avait manqué, cette année-là, et les plus beaux des rosiers géants, très vieux, envahis d’une lèpre, étaient morts. Ah ! quelle usure mélancolique de l’habitude ! comme l’éternelle nature avait l’air de se faire vieille, dans cette satiété lasse des mêmes horizons ! Mais le pis était que, en lui, le peintre se dégoûtait de la contrée, ne trouvant plus un seul motif qui l’enflammât, battant les champs d’un pas morne, ainsi qu’un domaine vide désormais, dont il aurait épuisé la vie, sans y laisser l’intérêt d’un arbre ignoré, d’un coup de lumière imprévu. Non, c’était fini, c’était glacé, il ne ferait plus rien de bon, dans ce pays de chien !

Octobre arriva, avec son ciel noyé d’eau. Un des