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Page:Emile Zola - L’Œuvre.djvu/24

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LES ROUGON-MACQUART.

qu’elle n’osait demander à la regarder de près. D’ailleurs, mal à l’aise dans ce lit où elle brûlait, elle s’agitait, tourmentée de l’idée de s’en aller, d’en finir avec ces choses qui lui semblaient un songe depuis la veille.

Sans doute, Claude eut conscience de cet énervement. Une brusque honte l’emplit de regret. Il lâcha son dessin inachevé, il dit très vite :

— Merci bien de votre complaisance, mademoiselle… Pardonnez-moi, j’ai abusé, vraiment… Levez-vous, levez-vous, je vous en prie. Il est temps d’aller à vos affaires.

Et, sans comprendre pourquoi elle ne se décidait pas, rougissante, renfonçant au contraire son bras nu, à mesure qu’il s’empressait devant elle, il lui répétait de se lever. Puis, il eut un geste de fou, il replaça le paravent et gagna l’autre bout de l’atelier, en se jetant à une exagération de pudeur, qui lui fit ranger bruyamment sa vaisselle, pour qu’elle pût sauter du lit et se vêtir, sans craindre d’être écoutée.

Au milieu du tapage qu’il déchaînait, il n’entendait pas une voix hésitante.

— Monsieur, monsieur…

Enfin, il tendit l’oreille.

— Monsieur, si vous étiez assez obligeant… Je ne trouve pas mes bas. 

Il se précipita. Où avait-il la tête ? que voulait-il qu’elle devînt, en chemise derrière ce paravent, sans les bas et les jupes qu’il avait étendus au soleil ? Les bas étaient secs, il s’en assura en les frottant doucement ; puis, il les passa par-dessus la mince cloison, et il aperçut une dernière fois le bras nu, frais et rond, d’un charme d’enfance. Il lança ensuite les jupes sur le pied du lit, poussa les bottines, ne laissa