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L’ŒUVRE.

forcé de paraître… Il s’échappera et nous rejoindra vers onze heures.

Mais, à ce moment, on apporta une dépêche. C’était Dubuche qui télégraphiait : « Impossible de bouger. Toux inquiétante d’Alice. »

— Eh bien ! nous ne serons que huit, reprit Henriette, avec la résignation chagrine d’une maîtresse de maison qui voit s’émietter ses convives.

Et, le domestique ayant ouvert la porte de la salle à manger en annonçant que madame était servie, elle ajouta :

— Nous y sommes tous… Offrez-moi votre bras, Claude.

Sandoz avait pris celui de Mathilde, Jory se chargea de Christine, tandis que Mahoudeau et Gagnière suivaient, en continuant de plaisanter crûment ce qu’ils appelaient le rembourrage de la belle herboriste.

La salle à manger où l’on entra, très grande, était d’une vive gaieté de lumière, au sortir de la clarté discrète du salon. Les murs, couverts de vieilles faïences, avaient des tons amusants d’imagerie d’Épinal. Deux dressoirs, l’un de verrerie, l’autre d’argenterie, étincelaient comme des vitrines de joyaux. Et la table surtout braisillait au milieu, en chapelle ardente, sous la suspension garnie de bougies, avec la blancheur de sa nappe, qui détachait la belle ordonnance du couvert, les assiettes peintes, les verres taillés, les carafes blanches et rouges, les hors-d'œuvre symétriques, rangés autour du bouquet central, une corbeille de roses pourpres.

On s’asseyait, Henriette entre Claude et Mahoudeau, Sandoz ayant à ses côtés Mathilde et Christine, Jory et Gagnière aux deux bouts, et le domestique