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Page:Emile Zola - La Curée.djvu/269

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LA CURÉE

constance que Saccard reparla du mariage des enfants, et que les deux pères l’arrêtèrent définitivement.

Quand Maxime fut tâté à ce sujet, il éprouva un embarras. Louise l’amusait, la dot le tentait plus encore. Il dit oui, il accepta toutes les dates que Saccard voulut, pour s’éviter l’ennui d’une discussion. Mais, au fond, il s’avouait que, malheureusement, les choses ne s’arrangeraient pas avec une si belle facilité. Renée ne voudrait jamais ; elle pleurerait, elle lui ferait des scènes, elle était capable de commettre quelque gros scandale pour étonner Paris. C’était bien désagréable. Maintenant, elle lui faisait peur. Elle le couvait avec des yeux inquiétants, elle le possédait si despotiquement, qu’il croyait sentir des griffes s’enfoncer dans son épaule, quand elle posait là sa main blanche. Sa turbulence devenait de la brusquerie, et il y avait des sons brisés au fond de ses rires. Il craignait réellement qu’elle ne devînt folle, une nuit, entre ses bras. Chez elle le remords, la crainte d’être surprise, les joies cruelles de l’adultère, ne se traduisaient pas comme chez les autres femmes par des larmes et des accablements, mais par une extravagance plus haute, par un besoin de tapage plus irrésistible. Et au milieu de son effarement grandissant, on commençait à entendre un râle, le détraquement de cette adorable et étonnante machine qui se cassait.

Maxime attendait passivement une occasion qui le débarrassât de cette maîtresse gênante. Il disait de nouveau qu’ils avaient fait une bêtise. Si leur camaraderie avait d’abord mis dans leurs rapports d’amoureux une volupté de plus, elle lui empêchait aujourd’hui de rompre, comme il l’aurait certainement fait avec une autre femme. Il ne serait plus revenu ; c’était sa façon de dé-