Page:Emile Zola - La Joie de vivre.djvu/229

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après les souris… Vous voyez, il a le nez écorché et les yeux rouges. C’est qu’il en a senti une sous le fourneau, la nuit dernière ; et il n’a pas fermé l’œil, il a bouleversé ma cuisine avec son nez, il a encore la fièvre aux pattes. Un si gros chien, pour une si petite bête, est-ce ridicule !… D’ailleurs, il n’y a pas que les souris, tout ce qui est petit et tout ce qui grouille, les poussins un jour, les enfants de Minouche, ça l’allume à en perdre le boire et le manger. Des fois, il reste des heures, à souffler sous un meuble où a passé un cafard… En ce moment, il faut dire qu’il sent des choses pas ordinaires dans la maison…

Elle s’arrêta, en voyant des larmes emplir les yeux de Lazare.

— Faites donc un tour, mon enfant, reprit le docteur. Vous n’êtes pas utile ici, vous seriez mieux dehors.

Le jeune homme avait fini par se lever péniblement.

— Allons, dit-il, viens, mon pauvre Mathieu.

Quand il eut mis le médecin en voiture, il s’éloigna avec le chien, le long des falaises. De temps à autre, il devait s’arrêter pour attendre Mathieu, car celui-ci en effet vieillissait beaucoup. Son arrière-train se paralysait, on entendait ses grosses pattes traîner à terre comme des chaussons. Il ne faisait plus de trou dans le potager, il tombait vite étourdi, lorsqu’il se lançait après sa queue. Mais il se fatiguait surtout rapidement, toussant s’il se jetait à l’eau, se couchant et ronflant au bout d’un quart d’heure de promenade. Sur la plage, il vint marcher dans les jambes de son maître.

Lazare restait une minute immobile, à regarder un