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LES ROUGON-MACQUART.

ment de son cousin, qui affectait de ne pouvoir lui tout dire. Les vacances se passèrent de la sorte, en continuelles taquineries. Dans leurs promenades, lui, maintenant, semblait s’ennuyer, trouvait la mer bête, toujours la même ; cependant, il s’était mis à faire des vers, pour tuer le temps, et il écrivait sur la mer des sonnets, d’une facture soignée, de rimes très riches. Il refusa de se baigner, il avait découvert que les bains froids étaient contraires à son tempérament ; car, malgré sa négation de la médecine, il exprimait des opinions tranchantes, il condamnait ou sauvait les gens d’un mot. Vers le milieu de septembre, comme Louise allait arriver, il parla tout d’un coup de retourner à Paris, en prétextant la préparation de son examen ; ces deux petites filles l’assommeraient, autant reprendre un mois plus tôt la vie du quartier. Pauline était devenue plus douce à mesure qu’il la chagrinait davantage. Lorsqu’il se montrait brusque, lorsqu’il se réjouissait à la désespérer, elle le regardait des yeux tendres et rieurs dont elle calmait Chanteau, quand celui-ci hurlait dans l’angoisse d’une crise. Pour elle, son cousin devait être malade, il voyait la vie comme les vieux.

La veille de son départ, Lazare témoignait une telle joie de quitter Bonneville, que Pauline sanglota.

— Tu ne m’aimes plus !

— Es-tu sotte ! est-ce qu’il ne faut pas que je fasse mon chemin ?… Une grande fille qui pleurniche !

Déjà elle retrouvait son courage, elle souriait.

— Travaille bien cette année, pour revenir content.