Page:Emile Zola - Le Docteur Pascal.djvu/184

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Il ouvrit irrésistiblement à cet appel de jeunesse, gagné par cette joie.

— Oh ! viens donc, viens donc voir ce qu’un bel oiseau bleu a posé sur mon lit !

Et elle l’emmena dans sa chambre, sans qu’il pût refuser. Elle y avait allumé les deux flambeaux : toute la vieille chambre souriante, avec ses tentures d’un rose fané si tendre, semblait transformée en chapelle ; et, sur le lit, tel qu’un linge sacré, offert à l’adoration des croyants, elle avait étalé le corsage en ancien point d’Alençon.

— Non, tu ne te doutes pas !… Imagine-toi que je n’ai pas vu le carton d’abord. J’ai fait mon petit ménage de tous les soirs, je me suis déshabillée, et c’est lorsque je suis venue pour me mettre au lit, que j’ai aperçu ton cadeau… Ah ! quel coup, mon cœur en a chaviré ! J’ai bien senti que jamais je ne pourrais attendre le lendemain, et j’ai remis un jupon, et j’ai couru te chercher…

Alors, seulement, il remarqua qu’elle était à demi nue, comme le soir d’orage où il l’avait surprise en train de voler les dossiers. Et elle apparaissait divine, dans l’allongement fin de son corps de vierge, avec ses jambes fuselées, ses bras souples, son torse mince, à la gorge menue et dure.

Elle lui avait pris les mains, elle les serrait dans ses mains, à elle, de petites mains de caresse, enveloppantes.

— Que tu es bon et que je te remercie ! Une telle merveille, un si beau cadeau, à moi qui ne suis personne !… Et tu t’es souvenu : je l’avais admirée, cette vieille relique d’art, je t’avais dit que la Vierge de Saint-Saturnin seule était digne de l’avoir aux épaules… Je suis contente, oh ! contente ! Car, c’est vrai, je suis coquette, d’une coquetterie, vois-tu, qui voudrait parfois