tion de ces ressources dernières ; et l’on pouvait se fier à son économie, on était sûr qu’elle rognerait sur les centimes. Quant à Clotilde, qui n’avait jamais eu de bourse personnelle, elle ne devait même pas s’apercevoir du manque d’argent. Seul, Pascal souffrirait de n’avoir plus son trésor ouvert, inépuisable ; mais il s’était formellement engagé à tout faire payer par la servante.
— Ouf ! voilà de la bonne besogne ! dit-il, soulagé, heureux, comme s’il venait d’arranger une affaire considérable, qui assurait pour toujours leur existence.
Une semaine s’écoula, rien ne semblait changé à la Souleiade. Dans le ravissement de leur tendresse, ni Pascal ni Clotilde ne paraissaient plus se douter de la misère menaçante. Et, un matin que celle-ci était sortie avec Martine, pour l’accompagner au marché, le docteur, resté seul, reçut une visite, qui le remplit d’abord d’une sorte de terreur. C’était la revendeuse qui lui avait vendu le corsage en vieux point d’Alençon, cette merveille, son premier cadeau. Il se sentait si faible contre une tentation possible, qu’il en tremblait. Avant même que la marchande eût prononcé une parole, il se défendit : non ! non ! il ne pouvait, il ne voulait rien acheter ; et, les mains en avant, il l’empêchait de rien sortir de son petit sac de cuir.
Elle pourtant, très grasse et affable, souriait, certaine de la victoire. D’une voix continue, enveloppante, elle se mit à parler, à lui conter une histoire : oui ! une dame qu’elle ne pouvait pas nommer, une des dames les plus distinguées de Plassans, frappée d’un malheur, réduite à se défaire d’un bijou ; puis, elle s’étendit sur la superbe occasion, un bijou qui avait coûté plus de douze cents francs, qu’on se résignait à laisser pour cinq cents. Sans hâte, elle avait ouvert son sac, malgré l’effarement, l’anxiété croissante du docteur ; elle en tira une mince chaîne de cou, garnie par devant de sept perles,