Page:Emile Zola - Le Docteur Pascal.djvu/325

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C’était encore du bonheur qui arrivait. Ramond, dès la porte, cria gaiement :

— Victoire ! maître, je vous rapporte votre argent, pas tout, mais une bonne somme !

Et il conta les choses, un cas d’imprévue et heureuse chance, que son beau-père, M. Lévêque, avait tiré au clair. Les reçus des cent vingt mille francs, qui constituaient Pascal créancier personnel de Grandguillot, ne servaient à rien, puisque celui-ci était insolvable. Le salut s’était rencontré dans la procuration que le docteur lui avait remise un jour, sur sa demande, à l’effet d’employer tout ou partie de son argent en placements hypothécaires. Comme le nom du mandataire y était en blanc, le notaire, ainsi que cela se pratique parfois, avait pris un de ses clercs pour prête-nom ; et quatre-vingt mille francs venaient d’être retrouvés ainsi, placés en bonnes hypothèques, par l’intermédiaire d’un brave homme, tout à fait en dehors des affaires de son patron. Si Pascal avait agi, était allé au parquet, il aurait débrouillé cela depuis longtemps. Enfin, quatre mille francs de rentes solides rentraient dans sa poche.

Il avait saisi les mains du jeune homme, il les lui serrait, d’un air exalté.

— Ah ! mon ami, si vous saviez combien je suis heureux ! Cette lettre de Clotilde m’apporte un grand bonheur. Oui, j’allais la rappeler près de moi ; mais la pensée de ma misère, des privations que je lui imposerais, me gâtait la joie de son retour… Et voilà que la fortune revient, au moins de quoi installer mon petit monde !

Dans l’expansion de son attendrissement, il avait tendu la lettre à Ramond, il le força à la lire. Puis, lorsque le jeune homme la lui rendit en souriant, ému de le sentir si bouleversé, il céda à un besoin débordant de tendresse, il le saisit entre ses deux grands bras, comme un cama-