Page:Emile Zola - Le Docteur Pascal.djvu/361

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— Ah ! répéta-t-elle, si j’avais un outil !

Et elle cherchait de nouveau la lézarde du colosse, la fente où elle allait introduire les doigts, pour le faire éclater. Elle imaginait des plans d’assaut, elle rêvait des violences, puis elle retombait à la ruse, à quelque traîtrise qui lui ouvrirait les battants, rien qu’en soufflant dessus.

Brusquement, son regard brilla, elle avait trouvé.

— Dites donc, Martine, il y a un crochet qui retient le premier battant ?

— Oui, madame, il s’accroche dans un piton, en dessus de la planche du milieu… Tenez ! il se trouve à la hauteur de cette moulure, à peu près.

Félicité eut un geste de victoire certaine.

— Vous avez bien une vrille, une grosse vrille ?… Donnez-moi une vrille !

Vivement, Martine descendit à sa cuisine et rapporta l’outil demandé.

— Comme ça, voyez-vous, nous ne ferons pas de bruit, reprit la vieille dame en se mettant à la besogne.

Avec une singulière énergie, qu’on n’aurait pas soupçonnée à ses petites mains desséchées par l’âge, elle planta la vrille, elle fit un premier trou, à la hauteur désignée par la servante. Mais elle était trop bas, elle sentit que la pointe s’enfonçait ensuite dans la planche. Une seconde percée l’amena droit sur le fer du crochet. Cette fois, c’était trop direct. Et elle multiplia les trous, à droite et à gauche, jusqu’à ce que, se servant de la vrille elle-même, elle pût enfin pousser le crochet, le chasser du piton. Le pêne de la serrure glissa, les deux battants s’ouvrirent.

— Enfin ! cria Félicité, hors d’elle.

Puis, inquiète, elle resta immobile, l’oreille tendue vers la chambre, craignant d’avoir réveillé Clotilde. Mais toute la maison dormait, dans le grand silence noir. Il ne