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Page:Emile Zola - Le Rêve.djvu/214

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La nuit, pour ne pas manquer à son serment, Angélique évita d’abord de se mettre au balcon, dans la crainte de rejoindre Félicien, si elle l’apercevait en bas. Elle attendait, du fond de sa chambre. Puis, comme les feuilles elles-mêmes ne bougeaient point, endormies, elle se risqua, elle recommença à interroger les ténèbres. D’où le miracle allait-il se produire ? Sans doute, du jardin de l’Évêché, une main flambante qui lui ferait signe de venir. Peut-être de la cathédrale, où les orgues gronderaient et l’appelleraient à l’autel. Rien ne l’aurait surprise, ni les colombes de la Légende apportant des paroles de bénédiction, ni l’intervention des saintes entrant par les murs lui annoncer que Monseigneur voulait la connaître. Et elle n’avait qu’un étonnement, qui grandissait chaque soir : la lenteur du prodige à s’opérer. Ainsi que les jours, les nuits succédaient aux nuits, sans que rien, rien encore se montrât.

Après la seconde semaine, ce qui étonna plus encore Angélique, ce fut de n’avoir pas revu Félicien. Elle avait bien pris l’engagement de ne rien tenter pour se rapprocher de lui : mais, sans le dire, elle comptait que, lui, ferait tout pour se rapprocher d’elle ; et le Clos-Marie restait vide, il n’en traversait même plus les herbes folles. Pas une fois, en quinze jours, aux heures de nuit, elle n’avait aperçu son ombre. Cela n’ébranlait pas sa foi : s’il ne venait point, c’était qu’il s’occupait de