Page:Emile Zola - Le Rêve.djvu/240

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pas en elle que son vouloir ? une autre chose, qu’on y avait mise sans doute, la contrecarrait, bouleversait la bonne simplicité de sa passion. C’était si simple, de courir à celui, qu’on aime ; et elle ne le pouvait déjà plus, le tourment du doute la tenait : elle avait juré, puis ce serait très mal peut-être. Le soir, lorsque la lessive fut sèche et qu’Hubertine vint l’aider à la rentrer, elle ne s’était pas décidée encore, elle se donna la nuit pour réfléchir. Les bras débordant de ces linges de neige, qui sentaient bon, elle jeta un regard d’inquiétude au Clos marie, déjà noyé de crépuscule, comme à un coin de nature ami refusant d’être complice.

Le lendemain, Angélique s’éveilla pleine de trouble. D’autres nuits se passèrent, sans lui apporter une résolution. Elle ne retrouvait son calme que dans sa certitude d’être aimée. Cela était resté inébranlable, elle s’y reposait divinement. Aimée, elle pouvait attendre, elle supporterait tout. Des crises de charité l’avaient reprise, elle s’attendrissait aux moindres souffrances, les yeux gonflés de larmes toujours près de jaillir. Le père Mascart se faisait donner du tabac, les Chouteau tiraient d’elle jusqu’à des confitures. Mais surtout les Lemballeuse profitaient de l’aubaine, on avait vu Tiennette danser dans les fêtes, avec une robe de la bonne demoiselle. Et voilà, un jour, comme Angélique apportait à la mère Lemballeuse des chemises promises la veille, qu’elle aperçut de