Page:Emile Zola - Le Rêve.djvu/276

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marchait l’abbé Cornille, un crucifix à la main et le rituel sous l’autre bras.

Debout un moment à la porte, l’évêque dit d’une voix grave :

Pax huic domui.

Et omnibus habitantibus in ea, répondit plus bas le prêtre.

Quand ils furent entrés, Hubertine, qui remontait à leur suite, tremblante elle aussi de saisissement, vint s’agenouiller près de son mari. L’un et l’autre, prosternés, les mains jointes, prièrent de toute leur âme.

Au lendemain de sa visite à Angélique, l’explication terrible avait eu lieu entre Félicien et son père. Dès le matin, ce jour-là, il força les portes, se fit recevoir dans l’oratoire même, où l’évêque était encore en oraison, après une de ces nuits de lutte affreuse contre le passé renaissant. Chez ce fils respectueux, courbé jusqu’alors par la crainte, la révolte débordait, longtemps étouffée ; et le choc fut rude, qui heurtait ces deux hommes, du même sang, prompt à la violence. Le vieillard, ayant quitté son prie-Dieu, écoutait, les joues tout de suite empourprées, muet, dans une obstination hautaine. Le jeune homme, la flamme également au visage, vidait son cœur, parlait d’une voix qui s’élevait peu à peu, grondante. Il disait Angélique malade, à l’agonie, il racontait dans quelle crise de tendresse épouvantée il avait fait le projet de