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POT-BOUILLE

avait fouiné jusque dans la table de nuit, pour retrouver ses gants blancs.

Enfin, il les dénicha au fond du lit même, aplatis et tout chauds. Une dernière fois, il donna un coup d’œil à la glace, alla cacher la clef de la chambre à l’endroit convenu, au bout du corridor, sous un vieux buffet laissé par un locataire, et descendit le premier, accompagné d’Octave. Dans le grand escalier, quand il eut dépassé la porte des Josserand, il reprit tout son aplomb, boutonné très haut pour cacher son habit et sa cravate.

— Au revoir, mon cher, dit-il en forçant la voix. J’étais inquiet, j’ai passé prendre des nouvelles de ces dames… Elles ont parfaitement dormi… Au revoir.

Octave le regarda descendre en souriant. Puis, comme l’heure du déjeuner approchait, il résolut de reporter la clef du grenier plus tard. Au déjeuner, chez les Campardon, il s’intéressa surtout à Lisa, qui servait. Elle avait son air propre, sa mine agréable ; et il l’entendait encore, la voix éraillée par les gros mots. Son flair de la femme ne l’avait pas trompé sur cette fille à poitrine plate. Du reste, madame Campardon continuait d’en être enchantée, s’étonnant de ce qu’elle ne la volait pas, ce qui était vrai, car son vice était ailleurs. En outre, elle paraissait très bonne pour Angèle, la mère se reposait entièrement sur elle.

Justement, ce matin-là, Angèle disparut au dessert, et on l’entendit qui riait dans la cuisine. Octave osa risquer une réflexion.

— Vous avez peut-être tort, de la laisser si libre avec les domestiques.

— Oh ! il n’y a pas grand mal, répondit madame Campardon, de son air de langueur. Victoire a vu naître mon mari, et je suis si sûre de Lisa… Puis, que voulez-vous ? cette petite me casse la tête. Je deviendrais