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POT-BOUILLE

rapetissé, souffrant d’une migraine, dont il se méfiait depuis trois jours, montait à ce moment prendre sa fiancée, en compagnie de son père et de son beau-frère, tous les deux solennels. Il y eut un peu de bousculade, car on avait fini par être en retard. Deux de ces dames, madame Duveyrier et madame Dambreville, durent aider madame Josserand à mettre son châle ; c’était un châle tapis, immense, à fond jaune, qu’elle continuait de sortir dans les grandes occasions, bien que la mode en fût passée, et qui la drapait d’une tenture dont l’ampleur et l’éclat révolutionnaient les rues. Il fallut encore attendre M. Josserand, en train de chercher sous les meubles un bouton de manchette, balayé la veille aux ordures. Enfin, il parut, il balbutia des excuses, l’air éperdu, heureux pourtant, et descendit le premier, en serrant fortement le bras de Berthe sous le sien. Derrière, passèrent Auguste et madame Josserand. Puis venait la queue du monde, au hasard de la sortie, troublant d’un murmure le silence grave du vestibule. Théophile s’était emparé de Duveyrier, dont il effarait la dignité avec son histoire ; et il geignait à son oreille, il exigeait des conseils, tandis que, devant eux, Valérie, remise, l’attitude modeste, recevait les tendres encouragements de madame Juzeur, sans paraître remarquer les regards terribles de son mari.

— Et ton paroissien ! cria tout d’un coup madame Josserand désespérée.

On était déjà dans les voitures. Angèle dut remonter chercher le paroissien de velours blanc. Enfin, on partit. Toute la maison se trouvait là, les bonnes, les concierges. Marie Pichon était descendue avec Lilitte, habillée, comme sur le point de sortir ; et la vue de la mariée, si jolie et si bien mise, la remua aux larmes. M. Gourd remarqua que, seuls, les gens du second n’avaient pas bougé de chez eux : de drôles de loca-