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LES ROUGON-MACQUART.

— Messieurs, la session du Corps législatif va être close…

Il fut d’abord question du budget, que la Chambre venait de voter en cinq jours. Le ministre des finances signala les vœux exprimés par le rapporteur. Pour la première fois, la Chambre avait des velléités de critique. Ainsi, le rapporteur souhaitait voir l’amortissement fonctionner d’une façon normale et le gouvernement se contenter des crédits votés, sans recourir toujours à des demandes de crédits supplémentaires. D’autre part, des membres s’étaient plaints du peu de cas que le Conseil d’État faisait de leurs observations, quand ils cherchaient à réduire certaines dépenses ; un d’entre eux avait même réclamé pour le Corps législatif le droit de préparer le budget.

— Il n’y a pas lieu, selon moi, de tenir compte de ces réclamations, dit le ministre des finances en terminant. Le gouvernement dresse ses budgets avec la plus grande économie possible ; et cela est tellement vrai, que la commission a dû se donner beaucoup de mal pour arriver à retrancher deux pauvres millions… Toutefois, je crois sage d’ajourner trois demandes de crédits supplémentaires, qui étaient à l’étude. Un virement de fonds nous donnera les sommes nécessaires, et la situation sera régularisée plus tard.

L’empereur approuva de la tête. Il paraissait ne pas écouter, les yeux vagues, regardant comme aveuglé la grande lueur claire tombant de la fenêtre du milieu, en face de lui. Il y eut de nouveau un silence. Tous les ministres approuvaient, après l’empereur. Pendant un instant, on n’entendit plus qu’un léger bruit. C’était le garde des sceaux qui feuilletait un manuscrit de quelques pages, ouvert sur la table. Il consulta ses collègues d’un regard.