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SON EXCELLENCE EUGÈNE ROUGON.

membres du Corps législatif qui auront été honorés trois fois du mandat de leurs concitoyens ; 2o aux conseillers d’État, après huit ans d’exercice ; 3o au premier président et au procureur général de la cour de cassation, au premier président et au procureur général de la cour des comptes, aux généraux de division et aux vice-amiraux, aux archevêques et aux ministres plénipotentiaires, après cinq ans d’exercice dans leurs fonctions, ou s’ils ont obtenu le grade de commandeur de la Légion d’honneur… »

Et il continua ainsi. Les premiers présidents et les procureurs généraux des Cours impériales, les généraux de brigade et les contre-amiraux, les évêques, jusqu’aux maires des chefs-lieux de préfecture de première classe, devaient être faits barons ; seulement, on leur demandait dix ans de service.

— Tout le monde baron, alors ! murmura Rougon à demi-voix.

Ses collègues, qui affectaient de le regarder comme un homme mal élevé, prirent des mines graves, pour lui faire comprendre qu’ils trouvaient cette plaisanterie très-déplacée. L’empereur avait paru ne pas entendre. Cependant, lorsque la lecture fut terminée, il demanda :

— Que pensez-vous du projet, messieurs ?

Il y eut une hésitation. On attendait une interrogation plus directe.

— Monsieur Rougon, reprit Sa Majesté, que pensez-vous du projet ?

— Mon Dieu ! Sire, répondit le ministre de l’intérieur en souriant de son air tranquille, je n’en pense pas beaucoup de bien. Il offre le pire des dangers, celui du ridicule. Oui, j’aurais peur que tous ces barons-là ne prêtassent à rire… Je ne mets pas en avant les raisons graves, le