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Page:Emile Zola - Son Excellence Eugène Rougon.djvu/447

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SON EXCELLENCE EUGÈNE ROUGON.

Tous montèrent d’un élan, se jetèrent dans la salle des séances, où les députés, debout à leur banc, furibonds, les bras tendus, menaçant un orateur impassible à la tribune, criaient :

— À l’ordre ! à l’ordre ! à l’ordre !

— À l’ordre ! à l’ordre ! crièrent plus haut M. La Rouquette et ses amis, tout en ignorant ce dont il s’agissait.

Le vacarme était épouvantable. Il y avait des piétinements enragés, un roulement d’orage obtenu par les planchettes des pupitres secouées violemment. Des voix glapissantes, suraiguës, jetaient des notes de fifre au milieu d’autres voix ronflantes, prolongées comme des accompagnements d’orgue. Par moments, les bruits semblaient se briser, le tapage se fêlait ; et alors, au milieu de la clameur mourante, des huées montaient, des paroles s’entendaient :

— C’est odieux ! c’est intolérable !

— Qu’il retire le mot !

— Oui, oui, retirez le mot !

Mais le cri obstiné, le cri qui revenait sans arrêt, comme rythmé par le battement des talons, c’était ce cri : « À l’ordre ! à l’ordre ! à l’ordre ! » s’aigrissant, s’étranglant dans les gosiers séchés.

À la tribune, l’orateur avait croisé les bras. Il regardait en face la Chambre furieuse, ces faces aboyantes, ces poings brandis. À deux reprises, croyant à un peu de silence, il ouvrit la bouche ; ce qui amena un redoublement de tempête, une crise d’emportement fou. La salle craquait.

M. de Marsy, debout devant son fauteuil de président, la main sur la pédale de la sonnette, sonnait d’une façon continue ; un carillon d’alarme au milieu d’un ouragan. Sa haute figure pâle gardait un sang-froid parfait. Il s’arrêta un instant de sonner, tira ses manchettes tran-