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LES ROUGON-MACQUART.

ques pas, au milieu d’une chambre close et silencieuse.

— Hein ? dit-elle en levant la lampe, c’est gentil.

C’étaient deux pièces carrées qui communiquaient entre elles par une porte dont on avait enlevé les vantaux ; une portière seulement les séparait. Toutes deux étaient tendues de la même cretonne rose à médaillons Louis XV, avec des Amours joufflus s’ébattant parmi des guirlandes de fleurs. Dans la première pièce, il y avait un guéridon, deux bergères, des fauteuils ; dans la seconde, plus petite, un lit immense tenait toute la place. La mère Fétu fit remarquer au plafond une veilleuse de cristal, suspendue par des chaînes dorées. Cette veilleuse représentait, pour elle, le comble du luxe. Et elle donnait des explications.

— Vous ne vous imaginez pas le drôle de corps. Il allume tout en plein midi, il reste là, à fumer un cigare, en regardant en l’air… Ça l’amuse, parait-il, cet homme… N’importe, il a dû en dépenser, de l’argent !

Hélène, sans parler, faisait le tour des pièces. Elle les trouvait inconvenantes. Elles étaient trop roses, le lit était trop grand, les meubles trop neufs. On sentait là une tentative de séduction blessante dans sa fatuité. Une modiste aurait succombé tout de suite. Et, cependant, un trouble peu à peu agitait Hélène, tandis que la vieille continuait, en clignant les yeux :

— Il se fait appeler monsieur Vincent… Moi, ça m’est égal. Du moment qu’il paie, ce garçon…

— Au revoir, mère Fétu, répéta Hélène qui étouffait.

Elle voulut s’en aller, ouvrit une porte et se trouva