de lui être favorable. Celle-ci lui promet de s^intérelTer
en fa faveur , mais elle lui expofe le danger
qu’elle court d’être feule avec lui ; elle craint ta
jaloufie de Fernand. Le François toujours pétulant,
&. plus occupé de fon amour que des inquiétudes
dlnés , fe jette à ks genoux , pour la preiler de ne
point oublier de parler à Béatrix. Fernand paroit ,
^ fans rien examiner, il s’élance avec fureur fur
Clitandre ; il lui faiHt la main d ?ns rinftant qu il
baife celle d*Inés & qu’elle fait des efforts pour
s’en défendre ; & furle^champ il tire un poignard
pour le frapper ; mais Inès pare le coup, & Beatrix
attirée par le bruit , couvre de fon corps celui de
fon amant. L’Efpagnol dès cet inftant interprète le
fehtiment (tlnès à fon d^favantage ; il prend fa
compaHîon pour de la tehdreife , fes craintes pour
de l’amour ; excité par les images que la jaloufie
porte dans fon cœur , il fe dégaee d’Inès & court
lur Clitandre. La fuite précipitée de celui - ci le
fauve du danger ; mais rÈCpagnol au défefpoir de
n*avoir puaffouvir fa rage, le retourne avec promptitude
vers Inès pour lui porter le coup qn*iî deftinoit
à fon prétendu rival. Il veut la frapper , mais
le mouvement qu’elle fait pour voler au devant
du bras qui la menace, arrête le tranfport du jiloux
& lui fait tomber le fer de la main. Un geAe
d*Inès femble reprocher à fon amant fon injulllce.
Défefpérée de furvivre au fouriçon qu’il a conçu
de fon infidélité, elle tombe fur un fauteuil : Fernand
toujours jaloux , mais honteux de fa barbarie ,
fé jette fur un autre fîège. Les deux amans offrent
Tiniage du (léfefpqrr & de Famour en courroux.
Leurs yeux fe cherchent & s’évitent, s’enflamment
& s’attendriflent. Inès tire une lettre de (on fein ,
Fernand Fimite ; chacun y lit les fentiments de
lamour le plus rendre ; miis tous deux fe croyant
trompés , déchirent avec dépit ces premiers gages
de leur amour. Egalement piqués de ces marijues
de mépris , ils regardent attentivement les portraits
qu’ils ont l’un de l’autre , Se n’jr voyant plus que
les traits de l’infidélité & du parjure , ils les jettent
à leurs pieds. Fernand exprime cependant par fis
geftes & fes regards combien ce facrifice lui déchire
le cœur ; c’eft par un effort violent qu’il fe
défait d’un portrait qui lui eft fi cher ; il laifle tomber,
ou pour mieux dire , il le laide échapper avec
peine de fes mains. Dans cet inflar ?t il fe jette fur
lôn fiége , & fe livre à la douleur & au défefpoir.
Béatrir , témoin de cette fcène , fait alors des efforts
pour les raccommoder, & pour les engager
l’un & l’autre à s’approcher réciproquement. Inès
fait les premiers pas ; mais s’appercevant que Ftr^
nand ne répond point à fon eœpreflcment , elle
prend la fuite ; Béatrix l’arrête fur-le-champ ; &
l’Efpagnol voyant que fa maîtrcfTe veut l’éviter ,
fuit à fon tour avec un air d’accablement & de
dépit.
Béatrix perfide, & veut toujours les contraindre à faire la paix. Pour cet effet elle Jes obligea fe donner la main ; ils fe font tirer i un & laiitre , mais elle parvient enfin à les rapprocher & à le» réunir. Elle les confidère enfuite avec un fourire malin. Les deux amans n’ofant encore fe regarder , malgré l’envie qu’ils en ont , fe trouvent dos à dos y infenfiblement ils fe retournent. Inès , par un regard , affure le pardon de Fernand , qui lui baife la main avec tranfport ; & ils fe retirent tous trois pénétrés de la joie la plus vive*
Clitandre paroît fur la fcène. Son entrée eft un monologue ; elle emprunte fes traits de la crainte & de l’inquiétude. 11 cherche fa maitreffe ; mais appercevant Fernand^ il fuit avec célérité. Celuici témoigne à Bcattix fa reconnoifiance ; mais conv me rien ne reflemble plus à l’amour que tamirié , Inès qui le furprend tandis qu’il baiie la main à Béatrix , en prend occafion pour fe venger de la fcéné que la jaloufie de fon amant lui a fait eiluyer. Elle feint d’être jaloufe à fon tour. L’Efpagnol la croyant réellement affcâée de cette paffion , cherche à la détromper en lui donnant de nouvelles nffuranccs de fa tendreflfe ; elle y paroît infenfibley & ne le regardant qu’avec des yeux troublés & menaçans , elle lui montre un poignard ;J1 frémit , il recule de frayeur ; fl s’élance pour le lui arracher, mais elle feint de s’en frapper ; elle chajîcéle & tombe dans les bras de fes fuivantes. A ce fpeâacle Fernand àtmtxxxQ immobile & fans fentiment » & n’écoutant foudain que fon défefpoir , il s’y livre tout entier & tente de s’arracher la vie. Tous les Efpagnols fe jettent fur lui & le défarmcnt. ; furieux, il lutte contre eux & cherche à rcfifler à leurs effoîts ; il en terraffe plufieurs , mais accabjé par le nombre 6c par fa douleur , fes forces diminuent infenfiblement , fcs jamlî^ fe dérobent foi s lui , fes yeux s’obfcurcilTent ^ fe ferment ,’~fes traits annoncent la mort , il tombe évanoui dans les bras des Efpagnols.
Inès qui , dans les commencements de cette fcéne, jouiffoitdu plaifir d’une vengeance qu*elle croyoit innocente ifc dont elle ne prcvoyqit point les fuites , s’apperccvant de fes trifies efléts , donne les marques les plus convaincantes de la finccrité de fon repentir i elle vole à fon amant , le ferre ten ;lrement dans fes bras , le prend par la main , & s’efforce de le rappeler à la vie. Fernand ouvre les yeux ; fa vue paroît troublée , il tourne la tJte du côté dlnés ; mais quel eft fon étonnement ! il croit à peine ce qu’il voit ; il ne peut fe perfuadcr qu’Inès vive encore ; & doutant de fon bonheur , il exprime tour-^-tour fa furprife , fa crainte , fa joie , fa tendrefle & fon ravififement ; il tombe aux genoux de fa maître (Te, qui le reçoit dans fes bras avec les tranfports de l’amante la plus paffionnée.
Les diflferens événements que cette fcène a produits rendent l’aftion générale ; le plaifir s’empare de touts lès cœurs ; il fe manifefic par les danlcs oii Fernand ^ Inès , Béattix & Clirundr.- préfidcnt. Après plufieurs pas particuliers qui peignent l’en-