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manger les semences & de paître son beau verd, lequel est conservé par cette couverture, même contre le froid excessif. L'eau des rivières & des ruisseaux, venant quelquefois à déborder, couvre les prés & les terres voisines & les arrose ; mais elle le fait diversement : car selon la diversité des eaux & des terres, elle y fait du bien ou du dommage, y laissant ou ôtant d'autre bonne ou mauvaise terre ; & selon la qualité des plantes mêmes, elles en sont tantôt heureusement abreuvées, & tantôt noyées & étouffées.

Mais l’arrosement artificiel se fera à tems & à propos, par l'intelligence du jardinier, en qui connoîtra le besoin, selon la nature des terres & des plantes. Il sera fait commodément, si vous avez les eaux naturelles, ou par artifice, plus hautes que les lieux que vous voudrez arroser, les laissant couler doucement, & en telle quantité qu'il en sera besoin, par les canaux de telles matières que vous les aurez, soit de bois, de plomb, ou de tuile, ou par les terres mêmes, y faisant des rayons & des rigoles, qui donnant l'eau par des sentiers des planches & le long les bordures, feront qu’elle abreuvera la terre par-dessous, rafraîchissant les racines, sans déchaîner les plantes, ainsi qu'il se fait quand l'eau y est versée tout-à-coup par-dessus avec l'arrosoir, lequel ne peut être percé si menu, que l'eau trop abondante n'affaisse la terre en tombant & dissolve l'humeur préparée pour la production, ou ne l'emmene plus profond en terre en lavant la surface. Il vaudroit mieux n'arroser point du tout que d'arroser peu ; car la terre en devient plus altérée, s'étant attendue à ce secours, qu'on lui fait seulement goûter ; il faut aussi arroser jusqu'au lieu où sont les racines, car ce sont elles qui en tirent plus de profit, & de qui la plante le reçoit. Quelques-uns arrosent en plein midi quand l'altération est plus grande, & que la chaleur qui est en la terre attiédit la froideur de l'eau, & ce n'est pas sans raison, pour certaines-plantes ; mais ces prompts changemens d'une extrémité à l’autre, sont contraires à la nature, qui aime d'être tempérée : c'est pourquoi, afin de ne pas faire les choses en un état si contraire, il vaut mieux arroser le soir conformément à la fraîcheur de la nuit, ou durant la nuit même, après avoir fait échauffer l'eau à l'air & au soleil pendant le long du jour ; car par ce moyen l'eau sera tempérée, la terre abreuvée à plaisir, les plantes attireront moins avidement, & cependant avec plus de vigueur durant la fraîcheur de la nuit : le matin aussi y seroit propre, à cause de la même fraîcheur, si ce n'est que l'eau étant devenue plus froide n'est plus si propre pour l'accroissement des plantes, parce que la froidure retarde l'effet de la terre, qui


ne doit pas être moins secourue de chaleur que d'humidité.

Il arrive souvent de l'inconvénient de l’arrosement, qu'on donne aux semences & aux nouveaux plants durant les sécheresses de l’été, par les animaux qui sont en terre, comme les taupes, les mulots, & les autres, qui ne sont pas moins altérés que les plantes ; car sentant l’humidité, ils la viennent chercher de loin, & s'assemblent en nombre à cette fraîcheur, ils mangent les graines en faveur desquelles l’arrosement avait été fait, & fouillant la terre & la soulevant, ils déracinent les plantes qui sont séchées par la chaleur qui pénètre ensuite plus facilement. C'est pourquoi je dis encore, qu'il vaut mieux n'arroser point, qu'arroser peu, & qu'heureux sont les jardins situés plus bas que les eaux, dont ils peuvent être arrosés en abondance à tems & heure. Les autres jardins ne laisseront pourtant pas d'être arrosés fort à propos avec l'arrosoir commun, ou avec la seringue, ou la pompe portative dans un sceau ou cuvier, faisant que le jallissement se fasse par quantité de trous menus percés ; & cette façon d'arroser est propre, entre autres pour laver les branches & les feuilles des arbres chargés de poussière, ou quand ils font mangés des chenilles & des autres insectes, en infusant dans l'eau les remèdes nécessaires pour les exterminer.

ARROSER ; donner de l'eau à une plante. Il faut savoir arroser à propos & en quantité suffisante. On juge qu'une plante n'a pas besoin d'être arrosée, lorsque ses feuilles sont d'un vert obscur, bien étendues & fermes, & que leur pédicule n'est point incliné. On doit prévenir les besoins des plantes dans les tems de hâle & de sécheresse, en leur donnant suffisamment d'eau pour entretenir leur vigueur. Il faut arroser fréquemment tout ce qui est nouvellement planté, depuis que la sève se dispose à monter jusqu'à la saison où elle diminue. Les végétaux placés en terre seche & légère, ont sur-tout besoin d'eau dans les grandes sécheresses. L'eau jettée au pied d'un arbre qui, faute de sève, laisse tomber ses fruits, les lui fait souvent conserver jusqu'à leur parfaite maturité.

Comme l'air est plus pesant quand le tems est serein, eue lorsqu'il paroît chargé de nuages, on lui rend son élasticité en arrosant beaucoup dans les grosses chaleurs. Pendant sept à huit mois de l’année, on doit arroser tout ce qui est dans un potager, à l'exception des asperges. (Dict. du jardinage.)

ARROSER PAR IMMERSION. (Voyez le mot Abreuver.)


Art aratoire.

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