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Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T01.djvu/153

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ment, & dont le blanc rend les lumières blafarde. Ce pourroit être par ces causes que leur diapazon (si l’on peut s’exprimer ainsi) est foible, souvent sourd & peu brillant. Mais, en général, la facilité que l’Artiste médiocre trouve dans l’affoiblissement des couleurs rompues, pour parvenir à une harmonie douce, la difficulté de soutenir l’accord de toutes les parties, en portant les tons locaux d’un tableau, le plus près possible de ceux de la Nature éclairée par une belle lumière, (sur-tout si l’on commence par monter les ciels & les plans éloignés) sont des raisons qui peuvent entraîner dans toutes les Écoles à affoiblir le coloris.

Mais comment nos Peintres distingués ne résistent-ils pas à cet affoiblissement, dans lequel ils ne tombent souvent qu’après avoir (dans le cours des études qu’ils ont faites en Italie) donné des preuves que l’harmonie vigoureuse n’est pas au-dessus de la portée de leurs organes & de leur intelligence ?

Il faut donc penser que des causes physiques établissent sur eux un ascendant presque irrésistible.

Au reste, le sens défavorable du mot affoiblir devient plus sensible encore, lorsqu’on l’applique à quelques autres parties principales ; car le complément de l’Art consiste, non pas dans une imitation énervée, mais dans la représentation, la plus semblable qu’il est possible, de la Nature dans toute son énergie.

Il est donc à propos de dire aux jeunes Artistes : Craignez, si vous vous sentez entraînés à affoiblir des tons fiers, pour courir après une harmonie douce, que ce ne soit une instigation du mauvais génie qui fait tomber un si grand nombre de vos Confrères dans un coloris foible, & qui leur inspire si souvent des expressions efféminées.

On parvient sans doute, en affoiblissant, à ne point blesser des yeux malades ou délicats ; mais c’est pour les organes qui ont toute leur vigueur que vous devez peindre. Il ne seroit plus d’énergie dans les Arts, si l’on se soumettoit, en les pratiquant, aux altérations que les grandes Sociétés, font éprouver à l’organisation, ainsi qu’aux ames de ceux qui les composent.

Préservez-vous donc de cet écueil, contre lequel, au retour de Rome, vous perdrez peut-être tout ce que vous aurez acquis de richesses pittoresques.

S’il étoit démontré que cet affoiblissement de coloris où tombe la plupart de nos Peintres, provient inévitablement de causes physiques prédominantes, il n’y auroit plus de conseils à donner à ce sujet ; mais Jouvenet, La Fosse, Le Brun sont restés coloristes en habitant le pays où vous êtes destinés à vous fixer.

Rappellez-vous tous les jours, en prenant votre


palette, & en la garnissant de couleurs, que la trop grande rupture, ou la fatigue que vous leur donneriez, les dénatureroit, comme la Société, trop activement désœuvrée, fait perdre aux hommes qui s’y livrent, leur caractère.

Pour éviter le premier inconvénient, qui vous regarde particulièrement, montez autant qu’il est possible & avec hardiesse votre accord, en commençant par vos fonds, par vos ciels, & leur donnant beaucoup de vigueur.

N’allez pas prévoir & craindre les difficultés d’arriver aux premiers plans : elles sont inévitables ; mais on les peut surmonter. Vous aurez, sans doute, à chercher pour trouver des tons propres à soutenir de plus en plus cette vigueur jusques aux premières figures de votre tableau ; mais vos efforts ne seront pas infructueux, s’ils sont obstinés, & si vous appellez à votre secours le Giorgion, Titien, Véronèze, comme les anciens Chevaliers invoquoient les plus célèbres Paladins, pour s’encourager dans les aventures difficiles.

Si vous devez vous garder de chercher l’harmonie en affoiblissant les tons, vous devez éviter, (je le répète) avec non moins de soin, d’affoiblir les autres parties constitutives de votre Art.

Car si vous altérez ou affoiblissez ; l’expression, sous prétexte de donner à vos figures plus de grace ; vous ferez ce que l’on pratique inhumainement en Italie, lorsqu’on ôte à la voix des Chanteurs leur énergie naturelle pour la rendre plus fléxible.

AG

AGRÉABLE, (adj.) La Peinture produit des ouvrages qu’on nomme agréables. Les sujets qui, par leur nature, sont susceptibles de présenter des objets, des actions, des sites, &c. que nous avons généralement du plaisir à voir ou à nous rappeller, donnent lieu à ces tableaux, lorsque l’Artiste saisit leur caractère.

On ne peut dire que l’agréable soit un genre, principalement dans l’Art de peindre, parce que des tableaux de tous les genres peuvent avoir ce caractère. Un tableau qui représente Adam & Eve, tels que les peint Milton, dans les beaux vergers d’Eden, seroit un tableau agréable du genre de l’Histoire. Des scènes tirées du Roman de Daphnis & Chloé seroient des Pastorales agréables : enfin, des fleurs & les portraits d’une jeune fille, d’une femme aimable, d’un bel enfant, sont des tableaux différens par le genre, mais semblables par le caractère agréable que leur auroient donné Van-Huysem & Rosa-Alba. Souvent une composition rassemble des parties agréables, qui contrastent avec d’autres d’un caractère différent. Le mérite des ouvrages agréables de tous