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d’associer la couleur vénitienne à ses autres qualités. Mais a-t-on bien examiné si ces qualités pouvoient s’associer avec la couleur vénitienne ; si cette couleur n’exigeoit pas le sacrifice de la très-grande pureté de dessin, de la très-grande finesse d’expression, & même de la très-grande sagesse de draperie ?

F. Chauveau a gravé le cloître des Chartreux : B. Audran, le beau tableau d’Alexandre malade qui se voit au Palais-Royal, B. Picart, Darius faisant ouvrir le tombeau de Nitocris : Et. Picard, le fameux tableau de l’église Notre-Dame, représentant S. Paul qui fait brûler les livres des Ephésiens : G. Audran, le martyre de Saint-Laurent.


(175) Thomas Blanchet, de l’école Françoise, né à Paris en 1617, se destina d’abord à la sculpture que la foiblesse de son tempéramment lui fit abandonner pour la peinture. Il se fit d’abord connoître par des peintures de perspectives, & il fit le voyage de Rome, où le Poussin, l’Algarde, André Sacchi lui conseillèrent de se livrer au genre de l’histoire. De retour à Paris, il fit pour l’église Notre-Dame le tableau qui représente le ravissement de Philippe après le baptême de l’Eunuque de Candace. À son passage par Lyon, il s’étoit lié avec un peintre de portraits qui l’appella dans cette ville & lui procura des ouvrages considérables. Il y eut la direction d’une académie de peinture, & le chagrin de voir détruire par un incendie celui de ses ouvrages qu’on regardoit comme son chef d’œuvre ; c’étoit le plafond de la grande salle de l’hôtel-de-ville. L’Académie royale de Paris, dérogeant en sa faveur à ses réglemens, le reçut en son absence, & il ne revint dans la capitale que pour faire les remercîmens à cette compagnie. Le tableau qu’il donna pour sa réception représente Cadmus tuant le dragon dont Pallas lui ordonne de semer les dents. Il n’est pas étonnant que cet artiste, fort estimé à Lyon, où sont presque tous ses ouvrages, soit peu connu ailleurs. On dit qu’il avoit une riche composition, une couleur vraie & solide telle que celle des Italiens, la science des convenances & celle de l’expression ; qu’il étoit bon dessinateur, quoique sa vivacité ne lui permît pas d’être toujours correct, & qu’il donnoit beaucoup de grace aux figures d’enfans. Il mourut à Lyon en 1689, a l’âge de soixante & douze ans. Son tableau de Notre-Dame a été gravé par Tardieu.


(176) François Ricci, de l’école Espagnole, né à Madrid en 1617, annonça ses talens par ses premiers ouvrages, & fut occupé pour les principales églises de l’Espagne.


Il peignit à fresque des coupoles dans lesquelles il développa la fécondité de son génie, & sa réputation le fit appeller à la cour. Il avoit une couleur vigoureuse, beaucoup de feu, peu de correction, une touche ferme & légère, des expressions fortes, une grande manière de draper. Il mourut à l’Escurial en 1684, âgé de soixante-sept ans.


(177) Pierre Vander Faes, plus connu sous le nom de Lély, appartient à l’école Allemande, & vit le jour à Soest, en Westphalie, en 1618. Il traita d’abord le paysage qu’il accompagnoit de figures, & s’essaya quelque temps dans l’histoire ; mais il ne tarda pas à se consacrer entièrement au portrait & à s’y distinguer. Van-Dyck n’étoit plus quand Lély se montra dans la carrière : il fut, dans ce genre, le premier de ses contemporains. Partout il eût trouvé la réputation, mais ce n’étoit qu’à Londres qu’il pouvoit trouver la fortune ; il s’y fixa. Il fut le premier peintre de Charles I ; il plusieurs fois, après la mort tragique de ce malheureux Prince, le portrait de Cromwel, & reprit sous Charles II le rang qu’il avoit occupé sous le père de ce Monarque. Il fut même décoré de l’ordre Chevaleresque, & eut l’une des places de Gentilshommes de la chambre. Comme Van-Dyck, il vivoit dans la grandeur, mais avec plus d’œconomie ; il étoit heureux enfin, lorsque Kneller vint à Londres & fut chargé de faire, en même temps que Lely, le portrait du Roi. Son ouvrage étoit presque terminé, que Lély n’avoit pas encore fini son ébauche. Cette promptitude charma le prince & toute la cour. On fut tenté de croire que l’artiste le plus prompt étoit le plus savant : Lély fut profondément blessé de cette injustice, & l’on attribue au chagrin qu’il en ressentit l’attaque d’apoplexie dont il mourut en 1680, à l’âge de soixante & deux ans. Ses plus beaux portraits le cédent à peine à ceux de Van-Dyck, &, ce qui est bien rare, quoiqu’il ne soit pas mort jeune, il ne cessa de faire des progrès qu’en cessant de vivre.


(178) Antoine Waterloo, de l’école Hollandoise, né à Utrecht en 1618, est connu par ses paysages, dont il fit les études aux environs de cette ville. C’est dire assez qu’ils sont peu variés ; mais ils sont recherchés par la légèreté des ciels, par la bonté de la couleur, & l’esprit du feuillé. Cet artiste seroit moins connu, s’il n’avoit pas beaucoup gravé à l’eau-forte. Il étoit né avec du patrimoine, il vendoit bien ses ouvrages, & il mourut de misere en 1660, à l’âge de quarante-deux ans, dans un hôpital.