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semens de l’hiver ; E. de Ghends, la promenade du prince d’Orange au village de Schevelingen.


(213) Claude le Fèvre, de l’école Françoise, né à Fontainebleau en 1633, fut successivement élève de le Sueur & de Lebrun. Ce dernier maître lui conseilla de se consacrer auportrait, & le Fèvre a été, dans ce genre, un des meilleurs peintres François. Il joignoit au mérite de la ressemblance, celui de la vérité, du sentiment, d’un bon caractère de dessin & de la couleur. Pour augmenter sa fortune, il passa à Londres, où il mourut en 1675, âgé de quarante-deux ans. Il a peint aussi, des Vierges & des Saintes-Familles. Il a gravé lui même à Beau-forte ; & les meilleurs graveurs de ses temps ont multiplié un grand nombre de ses portraits.


(214) Ciro Ferri, de l’école Romaine, naquit à Rome en 1634, avec une fortune assez considérable, qui ne ralentit point son ardeur pour la peinture :. Il fut le plus habile des élèves de Pierre de Cortone. Protégé par tous les papes qui fiégèrent de son temps il eût pu envahir tous les travaux de Rome, s’il avoit été avide de profit ; mais il ne l’étoit que de gloire. Il ressembla beaucoup à Pietre de Cortone, ou plutôt il lui ressembla trop : c’est la nature, & non des ouvrages d’artistes que l’art se propose d’imiter. On ne peut savoir ce qu’auroit été Ciro Ferri, s’il n’y avoit pas eu avant lui un Cortone. Ses ouvrages ont été pris souvent pour des tableaux de ce maître ; ce qui prouve que, dans aucune partie de l’art, il n’avoit un caractère qui lui fût propre. On le reconnoît cependant parce qu’il a moins d’élégance que son modèle ; ainsi, le caractère qui le distingue est un défaut.

Il faut pourtant convenir que c’est un peintre agréable, qui a de la facilité dans le faire, de la richesse dans les ordonnces, un beau mouvement, un bel enchaînement de grouppes, & qui mérite une place honorable dans l’école Romaine dégénérée : Il s’appliqua à l’architecture ; plusieurs palais, plusieurs autels ont été élevés sur ses dessins. Il mourut à Rome en 1689, âgé de cinquante-cinq ans.

On voit de lui un tableau au cabinet du roi : c’est une allégorie à la gloire de Louis XIV. On remarque, dans cet ouvrage qui a beaucoup souffert, une partie du mérite de Pietre de Cortone, mais peu d’effet & une lumière trop partagée.

On a un assez grand nombre d’estampes d’après ce peintre. Les plus belles sont celles de Corn. Bloemaert & de Spierre.


(215) Antoine-François Vander Meu-


len de l’école Flamande, naquit à Bruxelles en 1634. Quoique ses parens eussent de la fortune, ils se prêtèrent volontiers à son goût pour la peinture & le placèrent dans l’école de Pierre Snayers, peintre estimé pour le gen re des batailles. L’élève égala son maître avant même de sortir de l’école.

Quelques uns de ses ouvrages vinrent en France & l’on en fit sentir le mérite à Colbert. La principale destination de tous les arts étoit alors de flatter Louis XIV ; Lebrun fut bien aise d’avoir découvert un peintre capable de représenter les batailles gagnées par les armées de ce prince. Il en parla à Colbert, & le ministre ardent à saisir les occasions de chatouiller l’orgueil du souverain, manda Vander Merlen à Paris, le mit sur la liste des pensions, lui donna un logement aux Gobelins, & paya richement ses ouvrages. Borner le talent de l’artiste à ne faire, en quelque sorte, que le portrait de batailles réelles, de troupes aligrées suivant les règles de la tactique moderne, & vêtues d’un uniforme peu pittoresque, c’étoit mettre des entraves à son génie & en quelque sorte nuire à sa gloire : mais c’étoit en même temps servir sa gloire, que de lui procurer l’occasion de traiter des sujets intéressans pour une nation enthousiasme, amie des arts, & orgueilleuse de tout ce qui faisoit l’orgueil du prince. Les ouvrages de Vander Meulen perdent une grande partie de leur intérêt pour la postérite. On regrette que son génie ait été enchaîné ; mais on admire comment il a saisi tous les moyens qui lui restoient de lui rendre quelque liberté. On rend un juste hommage à l’exactitude, à la vérité de son dessin, à l’esprit de sa touche, à la suavité de ses ciels & de ses lointains, à la beauté de sa couleur, moins vigoureuse, mais peut-être plus agréable & plus vraie que celle du Bourguignon, à la légéreté de son feuillé, à la fraîcheur de son paysage, à son intelligence du clair-obscur qui lui faisoit créer de belles masses d’ombres & de lumières, lors même qu’il ne pouvoit disposer ni de son site, ni de l’ordonnance du plus grand nombre de ses figures. L’ingratitude de la plupart de ses sujets ne lui fera jamais perdre la place très-distinguée qu’il occupe entre les peintres de batailles & les paysagistes ; & les connoisseurs, en rendant justice au mérite réel de ses ouvrages, lui tiendront encore un compte particulier des difficultés qu’il avoit à combattre, & qu’il a sa vaincre autant qu’elles pouvoient être vaincues.

Il épousa en secondes nôces la nièce de (Lebrun. C’étoit un avantage pour sa fortune de s’allier au chef des arts en France ; mais cet avantage fut empoisonné par des chagrins domestiques qui le conduisirent au tombeau en 1690, à l’âge de cinquante-six ans.