Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T02.djvu/209

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■’» » » » » » » » » » » » » » I » » » JJ ^0 P M caftthç, que, fusvant l’ufage, on fufpend à la mailbn d’un malade. Nous y courûmes aufTuôt. Les parens , empreffts autour du l’t, adreflbient des prières à Mercure , condufteur des âmes ; & le malheureux Pyrrhus recevoic les derniers adieux de fa tendre époule. On parvint à l’arracher de ces lieux. Nous ..voulûmes lui rappeller les leçons qu’il avoit reçues à l’académie ; leçons fi belles quand on eft heureux ; fi importunes quand on eft dans le malheur. O philofophie , s’écria-t il, hier tu m’ordonnois d’aimer ma femme ; aujourd’hui tu me défends de la pleurer. Mais enfin, lui difoit-on, vos larmes ne la rendront pas à la vie. Ah ! répondit-il, c’efi : ce qui les redouble encore ». » Quand elle eut rendu les derniers foupirs, toute la maifon retentit de cris & de fanglots. Le corps fut lavé , parfumé d’eflences, ik revêtu d’une robe précieufe. On mit fur Ta tête, couverte d’un voile, une couronne de fleurs j dans les mains un gâteau de farine & de miel pour appaifer Cerbère 5 & dans fa bouche une pièce d’argent d’une ou deux oboles qu’il faut payer à Caron : Se en cet état, elle fut expofée pendant tout un jour dans le veftibule. A la porte étoit un vafe de cette eau luftrale deltinée à purifier ceux qui ont touché un cadavre ». » Cette expofition efl néceffaire pour s’affurer que la perfonne eft véritablement morte & qu’elle l’eft de mort naturelle. Elle dure quelquefois jufqu’au troifième jour. « Le convoi fut indiqué. Il falloir s’y rendre avant 1e lever du Ibleil ; les loix défendent de choifir une autre heure : elles n’ont pas voulu qu’une cérémonie fl trifte dégénérât en un fpeftacle d’oftentation. Les parens & les amis furent invités. Nous trouvâmes , aupi ;ès du cercueil , des femmes qui pouffoient de longs gémiffemens. Quelquesunes coupoient des boucles de leurs cheveux , Se les dépofoient à côté de Télaïre , comme un gage de leur tendreîTe & de leur douleur. On plaça le corps fur un chariot, dans un cercueil de cyprès. Les hommes marchoient avant, les femmes après ; quelques-uns la tête ral’ée, tous baiflant les yeux , vêtus de noir, 8z précédés d’un chœur de muficiens qui faiibient entendre des chants lugubres. Nous nous rendîmes à une maifon qu’avoir Pyrrhus auprès de Phalère : c’eft-là qu’étoient les tombeaux de fes pères. » L’ufage d’inhumer les corps fut autrefois commun parmi les nations ; celai de les brûler prévalut dans la fuite chez les Grecs : aujourd’hui il paroît indifférent de rendre à la terre ou de livrer aux flammes les reftes de nous-mêmest On plaça le corps de PO M ïj»p » Télaïre fur le bûcher ; quand 11 fut confumé , les plus proches parens en recueillirent les cendres , & l’urne qui les renfermoit fut enfevelie dans la terre. » Pendant la cérémonie , on fit des libations de vin. On jetta dans le feu quelques-unes des robes de Télaïre ; on lappelloit à » haute voix , & cet adieu éternel redoubloit » les larmes qui n’avoient ceffé de couler de » tous les yeux. » L)e-là nous fumes appelés au repas funèbie , oii la converCation ne roula que fur » les vertus de Téla’-re. Le neuvième & le » trentième jour , fes parens , habillés de blanc » & couronnés do flears, fe réunirent encore » pour rendre de nouveaux honneurs à fes » mânes ; & il fut réglé que , raffemblés tous » les ans le jour de fa naifTance , ils s’occu- >’ peroient de fa perte comme fi elle étoit encore récente. Cet engagement fi beau fe n perpétue ibuvent dans une famille , dans. » une fociété d’amis , parmi les difciples d’un » philolbphe. Les regrets qu’ils laiffent éclater dans ces circonftancesj fe renouvellent n dans la fête générale des morts qu’on célèbre au mois Antheftérion (i). Enfin j’ai vu » plus d’une fois des particuliers s’approcher » d’un tombeau, y dépofer une partie de leurs » cheveux , & faire tout autour des libations » d’eau, de vin , de lait & de miel. » Moins attentif à l’origine de ces rits, » qu’au fentiment qui les maintient , j’admirois la fageîfe des anciens legiflateurs, qui » impriment un caradère de fainteté à la fépulture & aux cérémonies qui l’accompagnent. Ils favorifèrent cette ancienne opinion que l’ame , dépouillée du corps quî » lui fert d’enveloppe, eft arrêtée fur les rivages du Styx , tourmentée du defir de fe » rendre à fa deftination , apparoiffant en fonge » à ceux qui doivent s’intéreffer à fon fort, » jufqu’à ce qu’ils aient fouftrai^ fes dépouilles mortelles aux regards du foleil ik aux » injures de l’air. » De-là cet empreffement à lui procurer le » repos qu’elle defire , l’injonftion faite au » voyageur de couvrir de terre un cadavre » qu’il trouve fur fon chemin ; cette vénération profonde pour les tombeaux , & les loix )j févères contre ceux qui les violent. » De-là encore l’ufage pratiqué à l’égard » de ceux que les flots ont engloutis ou qui » meurent en pays étranger fans qu’on ait pu » recouvrer leurs corps. Leurs compagnons, » avant de partir, les appellent trois fois à » haute voix ; &, à la faveur des facrifices » & des libations, ils fe flattent de ramener [i] Mois qui rcpondoiî i nos mois de Février & de Maa,