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ce métier confifte à entaffer des figures , des grouppes d’une flianière capable de flatter les yeux , & que par conféquent la meilleure des écoles eft celle de Naples qui a fourni les Giordano , les Solimeni , &c ; que dans la compofition , il eft affez inutile d’examiner f l’on introduit des figures, des grouppes inutiles, fi l’on en omet de néceffaires, fi chaque figure a le jufte mouvement, la véritable exprefiion de ce qu’elle doit faire ou exprimer ; mais qu’on doit avoir une grande attention d’établir de beaux grouppes , de les bien lier, de les bien cadencer , de bien faire pyramider toute la machine , &c. On appuyé ces préceptes de l’exemple de Piètre de Cortone & de vingt autres artiftes célèbres : l’élève écoute , il admire , & s’il n’a pas le vrai ’énie de l’art , il admirera toute fa vie. Il era le voyage de Rome, il verra Michel -Ange , Raphaël , l’antique -, il fera des études d’après eux : études vaines ; les premières leçons qu’il a reçues , les nombreux exemples qui les autoriCent , font profondément gravés dans 4bn efprit ; il ne s’en départira jamais : & en copiant Raphaël & l’antique , il fe propofera de ne les point imiter, ou de les corriger par la pratique des maîtres qu’on lui a donnés pour modèles.

Mais elt-il vrai qu’on ait jamais donné de fqmblables leçons ? Si vrai, que je n’ai changé que les termes , & que je les ai recueillies des écrits de quelques artiftes juftcment eftijnés : fi vrai , qu’elles font dépofées dans des tableaux admirés en France & en Italie. Il ne fuffit donc pas, pour atteindre au vrai but de l’art , que l’élève comme le dit M. Reynolds, reconnoiffe les occafions où fes maîtres s’écartent eux-mêmes de leurs principes : il faut, ce qui eft bien plus difficile, qu’il reconnoiffe quand ces principes font vicieux ; Il faut qu’il fe range feul , à côté dp l’anti-r ijue & des véritables grands-maîtres, contre tous fes contemporains (L).

PRESTESSE, (fubft. fem.),mot emprunté 4e l’italien Piefte-^a , & admis dans la langue de l’art pour exprimer la facilité & la promptitude de la manœuvre. On ne peut nier que cette qualité ne prête aux ouvrages un mérite féduilant, mais il efl impoflîble qu’elle ne nuife pas à d’autres mérites d’un genre lupérieur. On aime à voir que l’artifte a opéré en fe jouant , qu’il poffédoit affez bien les plus grandes difficultés de fon art pour n’en faire qu’un badinage , qu’il en avoir affez pénétré la fciençe ^ & fe l’étoit rendue affez familière pour pn marquer Tepipreinte dans les jeux de fon pinceau. On aime à fuivre la ii,arçhe légère & libertine qui fembloit de- .Ifpji l’égarer j & qui n’a fgit que le conduire PRE ’

plus promptement au but. On reconnoît avec plaiur dans fes ouvrages , ces grâces particulières qui toujours accompagnent l’adreffe, & qui fuient la fatigue du travail & celle de la réPexion.

La preflejje procure encore un autre avan«  tage qui l’a fait rechercher des peintres Vénitiens -, c’eft qu’elle eft favorable à la couleur qui n’cft jamais plus belle que quand elle n’eft pas tourmentée , que quand l’artifte la pofe largement ci : avec facilité fur la toile ou le paneaii pour n’y plus revenir. Le Titien fajfoit fes tableaux de peu de chofe, & les términoit par des touches fières & hardies. On ne pourroit fans injuftice lui refufer la fcience du deffin & la jufteffe du coup-d’œil ; mais il auroit craint de fatiguer fes couleurs, d’en altérer la fraîcheur ou l’éclat, s’il fe fût affervi à la grande pureté des formes -, & il a facrifié la correftion du deflin aux charmes brillans du coloris. Il fentoit peut-être que, dans les arts, on fait plus promptement des conquêtes par la féduélion que par la fageffe, ou plutôt il tujvit fon penchant , & l’on ne peut le condamner.

Ce n’étoit point fans doute undeflinateat méprifable que le Tintoret. On n’annonce pas auffi fièrement les formes fans les bien connoître. Mais il facrifia la pureté du deffin à celle de la couleur qu’il plaçoit du pinceau le plus vif & le plus hardi : aufli tient-il ua des rangs les plus illuûres entre les coloriftei, & il doit bien plus fa réputation à là prefiejfk -. qu’à la perfeftion de fes ouvrages. On peut S critiquer fes fautes ; on peut fç plaindre de ce qui manque 9 fes ouvrages qui femblent moins faits que jettes : mais il étonne , & on l’applaudit.

Ainfi la preftejfe a deux avantages ; çeluî d’exciter la forte d’admiration qii’infpire uae dextérité peu commune , & celui de Jaiflfer aux couleurs le charme de leur virginité. Mais elle a deux grands inconvéniens : celui de nuire à la grande correftion du deffin , celui de rie pas être compatible avec la grande finelTe de l’exprefiion.

« Le deffin exige , dit Mengs , une grande » patience & beaueoup de réflexion pour bien » mettre enfemble les différentes parties, & » le tout ». Mais eft-il poffible de rechercher la plus grande pureté des formes, leur accord, leur flexibilité ; d’être toujours iur fes gardes pour ne pa ? fortir du trait qui feul peut être jufte , fans qu’aucun autre puiffe le fuppléer ; pour ne pas feulement parvenir à la correâion, mais pour s’élever même à la beauté ; & de placer & fondre en même temps les çouleufi ; avec cette prejîejje qui ménage leur éclat î Les expreffions fortes peuvent s’accorder aves la prejlejè. Elles peuvent être regardées soi^pfi