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traduâeurs, cethiftorien auroitdit que l’artîfte donne à fes figures des yeux fermes. Au refte ces figures éqi’.arries étoient droites, roides, fans aclion, fans mouvement, ayant les bras pendans fur les côtés , St : les jambes parallèles & peu écartées l’une de l’aune. C’eft ainfi t[u’étoit exécutée la ftatue d’an Pancratiafte Arcadien, nomme Arrachion, vainqueur aux jeux olympiques dans la 54 ’olympiade, 564 ans avant notre ère. On reconnoiffoit, dans cette flatue, dit Paufanias, tous les caraàlères de la haute antiquité. Les jambes étoient peu réparées, les bras étoient pendans fur les cuilTes : cet Arrachion étoit mort, quand les juges de l’Elide lui décernèrent la palme , déjà il étoit vainqueur de tous fes adverfaires ; un feul reftoit encore qui le furprit, le fit tomber en lui (alfiflanr la jambe, & l’étrangla ; mais Arrachion, en expirant, ferra avec tant de force l’orteil de fon vainqueur, qu’il l’obligea de défavouer fa vicloire.

On regarde ordinairement les Grecs comme les élèves des Egyptiens ; dans cette fuppofiiion , on auroit lieu d’être étonné de la lenteur de leurs progrès, puifqu’en recevant l’art tel qu’ils le trouvoient en Egypte, ils n’avoient plus qu’à lui procurer des perfeftions nouvelles, tu lieu de s’arrêter à faire de longs tâtonnemens. Mais on devroit obfet’ver que fi , dans une antiquité fort reculée, quelques colonies égyptiennes s’arrêtèrent dans la Grèce, on n’a pas lieu de fuppofer qu’elles aient amené des articles avec elles : les colonies que les Européens modernes envoyent dans le nouveau monde n’y portent pas auflltôt la culture des beaux arts. Les colonies égyptiennes, établies dans la Grèce, n’entretinrent aucune communication avec leurmére-patrie, & l’entrée de l’Egypte fut interdite aux étrangers jufqu’au règne de Pfamméticus, époque à laquelle les Grecs cultivoient les arts depuis long-temps, puifque ce prince ne commença fon régne que dans la 17 olympiade, 670 ans avant noire ère. Il eft très-vraifemblable que le premier lifage que firent les Grecs de la liberté d’entrer en Egypte, ne fut pas d’y aller étudier les arts, & qu’il ie paffa encore plufieurs fiècles avant qu’ils entrepriflbnt ce voyage dans ce deffein. S’il n’étoit pas prouvé par la lenteur fuccefllve de leurs progrès, dont l’hifloire nous a confervé les principales époques , qu’ils furent eux-mêmes leurs maîtres , ou plutôt qu’ils reçurent les leçons progreflives de la nature ; on pourroit les regarder plutôt comme des élèves des thèniciens.

Comme la nature infpire de s’arrêter d’abord aux formes principales, que, faute d’adreffe & d’expérience , on rend encore d’une ma- ’ tiière très-grofïïère, elle infpire aufli d’emtloyer d’abord les matières les plus faciles à ’ S C U

manier. Aînfi com.ne la peinture , dans Ccn origine, ne fit ulage que d’une feule couleur, avec laquelle elle traçoit un limple contour, de même la fculpture ne dut employer , dui s Ces premiers effai ? , que la terre, ik enfiue le bois : la terre, parce qu’il ne faut que la pétrir pour lui donner les formes qu’on veut lui faire prendre ; le bois, parce qu’il e A plus facile à tailler que la pierre IL le marbre, Ainfi les anciens artifles firent d’abord er. argile, & enfuite en bois, les otivrages bruts que leurs contemporains regardoient comme des chefs-d’œuvre. Au temps de Paufanias, on voyoit encore des Dieux de bois dans les lieux les plus célèbres de la Grèce, & ces vieux mnnumens infpiroient la vénération par leur vétusté même, Tel étoit l’Apollon de Delphes donné par les Cretois. Paufanias nous apprend que les anciens appelluient dedalesj daJalu, les figures en buis, & il croit que c eft du nom de ces figures que le célèbre fçulpteur Athénien, fils de Palamaon, reçut le nom de Dédale, qui fut entuice -porté par un autre fçulpteur natif de Sicyone, On fait que l’on peignoir en rouge les anciennes ftatues d’argile, furtout celles de .Jupiter, le fouverain ûes Dieux, celles de Pan, regardé comme le grand tout. Ce fait n’eft pas échappé à Winckelmann ; mais je fuis étonné qu’il n’en ait pas découvert l’origine ; cette découverte n’étoit aflurément pas au-deffus de fa fagacité ordinaire. L’ufage de frotter du fang desvidimes les repréfcntations des Dieux, fe trouve encore aujourd’hui chez les nations idolâtres les plus vbifines de l’état de nature ; il dut être auffi pratiqué par les Grecs. Mais quand, plus policés, ils prirent du dégoût pour ce fang, qui fe corrompoît fur les idoles, ils abandonnèrent ces fortes de libations, & en confervèrent cependant l’apparence en peignant leurs flatues d’une couleur de fang. C’eft : ainfi qu’en général les peuples, en s’éloignant de leur origine, conferventla repréfen» tation de ce qu’ils ne pratiquent plus. Quelquefois on fe contentoit de peindre en rouga les pieds des viiiimes, comme autrefois on s’étoit contenté de frotter leurs pieds de fang quaad elles étoient -fort élevées : Winckelmann , qui, je crois, fe trompe ici, penfe que Pindare a fait allufion à cet ufage quand il a donné des pieds rouges à Cérès. On voit fur des pieds délicats des teintes d’un rouge tendre , approchant de la couleur des rofe» , & l’on peut croire que c’efl ce qu’a voulu peindre le poète lyrique. Les Grecs ont pu faire des pieds d’argent aux ftatues de quelques dée(re5.’ : mais quand Homèreadit : Théds aux pieds d’argent, quand il a donné des pieds d’argent à d’autres divinités, il n’a fait aucune allufion à leurs ftatues ; il a voulu feulemeni