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Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T02.djvu/458

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448 CAR CAR queur au travers d’un linge ; pulvérisez un gros de cochenille, & mettez-la dans le même vase. Après trois ou quatre bouillons, retirez-la & versez la décoction dans un plat de sayence, pour la séparer de la lie, à moins que vous ne préfériez de la passer au travers d’un tamis de crin. Pour lors versez dans le plat, goutte à goutte, une certaine quantité de dissolution d’étain. Voici comment se fait cette dissolution. Versez dans une carasse une once d’acide nitreux, & moitié moins d’acide marin : ce mêlange est ce qu’on nomme eau régale : ayez soin d’éviter qu’il ne vous en tombe sur les doigts. Joignez-y, s’ils sont très fumans, un petit verre d’eau de fontaine ou de riviere bien limpide. Faites dissoudre dans ce mêlange de l’étain, soit de Malaca, soit de Cornouailles, réduit en petits fragmens, ajoutez de l’étain par intervalles, jusqu’à ce que le dissolvant n’agisse plus. Alors mettez la carasse sur la cendre chaude, pour que l’eau régale acheve de se saturer. La dissolution d’étain étant, comme on vient de le dire, versée dans te plat, la cochenille se rassemblera bientôt en petits flocons d’un rouge de sang. Laissezla reposer quelques heures, elle se précipitera d’elle-même. L’eau restera jaune. On peut la etter par inclinaison, & verser le précipité sur le papier lombard. Quelques momens après, il faut répandre, à plusieurs reprises, sur le papier, mais à côté du précipité, beaucoup d’eau chaude, pour le bien laver & le dessaler entierement. On donneroit à la fois plus de corps & plus de solidité au carmin, par cette manière de le préparer. Il résulte de quelques épreuves qu’on a faites, que le sue de l’écorce de bouleau, verte ou séche, fixe la couleur des bois de teinture, tels que le campêche & le fernambouc, toute fugitive qu’elle est : à plus forte raison peut-on compter que celle de la cochenille, beaucoup plus permanente, auroit toute la consistance nécessaire.

En effet, quelques gouttes de décoction de cochenille pure, sur du papier, deviennent, en séchant, d’un violet terne & sombre : elles restent, sur le même papier, d’un violet rougeâtre & net, avec l’eau de bouleau.

Quant à la chaux de l’étain, dissout par les acides, on sait qu’elle n’éprouve point de changement. C’est pour cela que je la substitue à la terre de l’alun, beaucoup plus susceptible d’altération. S’il falloit d’ailleurs des autorités pour justifier cette préférence, je pourrois citer MM. Hellot, Scheffer, Macquer, Bergman, qui, depuis longtemps, ont indiqué l’étain pour les opérations de la teinture, au lieu de l’alun, principalement dans la teinture de cochenille.

Je dois prévenir, au surplus, que quelquefois on ne réussit pas, & qu’il ne se fait pas de précipité ; de sorte que l’eau ne passe pas au travers du filtre, & qu’au lieu d’être jaunâtre, elle


reste couleur de sang. Il faut alors y joindre d’autre eau, chargée d’alkali fixe, pour opérer la séparation, ce qui même ne réussit pas toujours, lors, par exemple, que la dissolution d’étain qu’on employe ne devient pas laiteuse par l’addition de l’eau pure. Dans la teinture, c’est tout le contraire : le teinturier manquera son opération, si la dissolution d’étain devient laiteuse avec de l’eau, parce que la chaux métallique ne pénétrera pas alors dans les pores de la substance dont le tissu, qui doit recevoir la teinture, est composé. C’est une raison pour n’employer à cet usage qu’une dissolution d’étain faite par l’acide marin seul. Cet acide, avec le secours d’un feu très-léger, dissoud fort bien l’étain. Je n’ai pas cru devoir omettre cette observation, quoiqu’angère ici, vû son importance. La plûpart des ouvriers ne tirent que des teintures médiocres des bois de Fernambouc, de Brésil & de Campêche, faute de connaître ce mordant qui leur donneroit des couleurs solides, en y joignant la décoction de l’écorce de bouleau.

CARTON. (subst. masc.) Comme la peinture à fresque doit être exécutée sur un enduit frais, l’artiste ne peut pas tâtonner sur cet enduit la composition de son sujet, ni les formes & les contours de ses figures. Il. est donc obligé d’en faire d’avance des dessins de la même grandeur que seront ces objets peints, & il les calque sur l’enduit. Ce sont ces dessins qu’on appelle des cartons, parce qu’ils sont faits sur de grand papier qu’on nomme en italien Cartone. Souvent les peintres colorent ces dessins de la même manière qu’ils ont le projet de colorer leur fresque, & par ce moyen ils exécutent hardiment & avec promptitude ce qu’ils ont sous les yeux, & ce qu’ils ont déja bien étudié. Les cartons des grands maîtres sont très précieux. On regrette ceux de Léonard de Vinci & de Michel Ange, qui ont été détruits. Les cartons de Raphael déposés au château de Hamptoncourt, & gravés par P. Dorigny, sont comptés par les amateurs des arts, parmi les richesses de l’Angleterre. La France s’enorgueillit de posséder des cortons de Jules-Romain : les uns appartiennent au Roi, & les autres au Duc d’Orléans.

CENDRES BLEUES. Elles sont d’un grand usage dans la peinture en détrempe. Il y en a qui sont très vives en couleur : mais elles noircissent dans la peinture à l’huile & deviennent verdâtres. Elles ne sont autre chose qu’une terre chargée d’une certaine quantité de chaux naturelle de cuivre, & elles tiennent de la nature du ver-de-gris. On les trouve en pierre tendre & presque réduite en poudre, dans les lieux où il y a des mines de cuivre ou de rosette, surtout dans les mines de cuivre de Pologne, & dans un