dans sa jeunesse, c’étoit Rubens qu’il s’étoit choisi pour modèle, & il avoit fait des Rubens : en Italie, il fit de Carraches. Quand l’âge de l’imitation servile fut passé, quand il voulut être lui-même, il lui resta une manière composée des grandes qualités du peintre de Bologne & de celui d’Anvers. Sa couleur eut l’éclat de celle de Rubens ; son dessin tint du goût du Carrache, mais il fut moins chargé.
De retour dans sa patrie, il fut chargé des plus grandes entreprises. Il étoit frais dans les chairs, mais on lui reproche d’avoir trop peu rompu ses couleurs dans les draperies : cependant il n’avoit pas toujours ce défaut, & l’on connoît de lui des tableaux de la plus belle fonte. Il en a fait aussi dans lesquels on ne peut rien distinguer de près & qui de loin font un effet admirable. Il entendoit bien la partie du clair-obscur, jettoit bien les draperies, étoit noble dans ses attitudes, simple & ingénieux dans les accessoires. A l’exemple des grands maîtres, il composoit ses sujets d’un petit nombre de figures, regardant comme inutiles, & même nuisibles à l’objet principal, celles qui n’étoient pas nécessaires. On ne connoît de lui d’autres tableaux de chevalet que des esquisses très heurtées. Il n’avoit pas le talent de peindre le paysage ; quand il étoit forcé d’en introduire dans ses compositions il recouroit à des mains étrangères ; mais autant qu’il le pouvoit, il donnoit à ses tableaux des fonds d’architecture. Il ne réussissoit pas moins bien dans les portraits que dans l’histoire, & ses portraits eux-mêmes tenoient à ce dernier genre ; c’étoient des compositions & non de simples imitations individuelles. Son chef-d’œuvre en ce genre est dans une des salles de la jurisdiction de Bruges ; il représente les Magistrats condamnant à mort un criminel à qui on lit sa sentence. On remarque que cet artiste a fait des progrès jusqu’à la fin de sa vie ; il est mort vers sa soixante & dixième année en 1671.
M. Descamps donne la description d’un ouvrage de ce maître qui se voit à l’abbaye de Saint Tron, où sa fille étoit religieuse. « Le fond du chœur est une muraille unie, sur laquelle il a représenté un beau portique à l’entrée d’un temple ; ce portique occupe toute la hauteur du mur : l’entablement est soutenu par quatre colonnes de marbre blanc ; le reste de l’architecture est de marbre blanc & noir, avec des ornemens d’or : les profils & les formes de cette architecture sont admirables. L’entrée du temple est masquée par un rideau noir qu’ouvre un jeune homme, & le jeune-homme est le fils de Van Oost. Ce rideau entr’ouvert laisse voir le dedans de ce bel édifice dans lequel est représenté le Saint-Esprit qui descend sur la Vierge &
sur les Apôtres : la grande lumière que produisent les rayons du ciel, surtout par l’opposition des marbres du portique, en rend les effets surprenans. Au bas se trouvent cinq marches sur lesquelles on voit quatre Apôtres qui sont surpris de ce qui se passe au dedans. Un d’eux monte les marches avec précipitation, & se soutient à la première colonne. Van Oost s’est représenté lui-même sous la figure d’un de ces Apôtres. Sur les marches, il a cherché à interrompre les formes froides, & régulières : ici c’est un livre entr’ouvert, là ce sont des papiers ou manuscrits. Ce morceau trompe tous les jours les artistes mêmes. La perspective y est aussi bien observée que l’harmonie de la couleur. »
Jacques Van Oost, son fils, surnommé le jeune, marcha sur ses traces. Né en 1637, il mania le crayon dès la première enfance, fit le voyage de Rome & y étudia l’antique & les grands maîtres. S’il eût suivi son inclination, il se seroit fixé à Paris ; mais il fut retenu à Lille par les entreprises qui lui furent proposées & qui se succéderent. C’est dans cette ville que se trouvent ses principaux ouvrages. Il y passa quarante ans, & ne la quitta que dans la vieillesse, après la mort de son épouse. Il finit, en 1713, sa vie à Bruges, où il avoit pris naissance. A l’exemple de son père, il n’a pas fait de tableaux de chevalet, ce qui fait qu’il n’est guere connu que dans les villes où il a travaillé.
« Sa manière, dit M. Descamps, approche de celle de son père ; mais il est plus pâteux & sa touche est plus franche. Il drapoit de plus grande manière. Ses compositions ne sont pas abondantes, mais réfléchies : ses figures sont correctes & expressives ; son goût de dessin tient de la grande école ; sa couleur est bonne & produit de beaux effets. »
Il peignoit très bien le portrait ; mais ses partisans ont porté trop loin l’enthousiasme, quand, dans ce genre, ils l’ont comparé à Van-Dyck.
(134) Rembrandt. Voyez ce qui a été dit de ce peintre sous l’école Hollandoise, article Ecole.
(135) Laurent de la Hire, de l’école Françoise, né en 1606, étoit fils d’un peintre oui avoit travaillé en Pologne, & qui ne destinoit pas son fils à sa profession ; mais vaincu par l’inclination du jeune homme, il lui donna les principes de l’art. De tous les peintres qui étoient alors connus à Paris, il fut le seul qui ne suivit pas la manière du Vouet, & cette singularité put contribuer à sa réputation. Quoiqu’il ne fût pas sans mérite, il n’a pas été l’égal du maître qu’il dédaignoit d’imiter. A force de chercher le suave, il étoit mou : pour don-