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PRÉLIMINAIRE

l’attention qu’elle méritoit. De son côté, Jacques Bernoulli consentit que Léibnitz, Neuton & le Marquis de l’Hopital fussent pris pour Juges, pourvu qu’on lui donnât tout le tems de parler. Le procès traîna en longueur. En 1701, Jean Bernoulli envoya à l’Académie des Sciences de Paris sa solution, sous une enveloppe qui ne devoit être ouverte qu’après que son frère auroit publié sa Méthode. Celui-ci donna, en 1704, l’analyse & la solution complète de ses problêmes : prodige de sagacité & d’invention ; il mourut l’année suivante, à l’âge de cinquante ans.

La Méthode de Jean Bernoulli parut dans les Mémoires de l’Académie pour l’année 1706. Elle étoit effectivement défectueuse comme Jacques Bernoulli l’avoit toujours soutenu ; & voici en quoi consistoit l’erreur.

Dans tous les problêmes du même genre que celui de la plus vîte descente, où il s’agit simplement de remplir la condition du minimum ou du maximum, il suffit d’appliquer cette condition à deux élémens consécutifs de la courbe, pour en trouver l’équation différentielle. Mais, dans ceux où l’on est obligé de remplir tout-à-la-fois deux conditions, l’une qu’une certaine propriété soit la même, l’autre qu’une féconde propriété soit un minimum ou un maximum, il faut employer trois élémens consécutifs de la courbe : ou, si l’on veut n’en employer que deux, il faut multiplier les deux fonctions proposées, par des coëfficiens constans, ajouter ensemble les produits, & alors la somme résultante se rapporte aux problêmes du premier genre[1]. C’est à quoi Jean Bernoulli ne prit pas garde, & ce qui lui fit donner des solutions fausses, excepté dans les cas où une courbe ne peut pas satisfaire à l’une des deux conditions proposées, sans satisfaire en même-tems à l’autre. Jacques Bernoulli avoit considéré trois élémens de la courbe ; & par-là il étoit parvenu à une solution exacte & complète.

La force de la préoccupation empêcha long-tems Jean Bernoulli de reconnoître la vérité, & de lui rendre hommage. Enfin il reprit cette matière en 1718 ; il convint qu’il s’étoit trompé ; &, abandonnant ses anciennes Méthodes, il en donna une autre où il emploie, comme son frère, trois élémens de la courbe, & d’où il tire, d’une manière fort simple, les véritables équations du problême.

Il résulte de cet exposé, que Jacques Bernoulli eut, dans la question des Isopérimètres un avantage marqué sur son frère. Mais il faut se souvenir que celui-ci, pendant sa longue carrière, n’a cessé

  1. Voyez l’ouvrage de M. Euler, intitulé Methodus inveniendi lineas curvas maximi minimive propriatate gaudentes.