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ACT

vement qu’un corps quelconque produit ou tend à produire dans un autre, c’eſt-à-dire, qu’il produiroit en effet, ſi un obſtacle ne l’en empêchoit : ainſi, il n’y a point, en phyſique, d’action ſans mouvement, ou ſans tendance au mouvement, & réciproquement tout effort ou tout mouvement, ſuppoſe néceſſairement une action.

Le terme d’action ſe prend tantôt pour l’effort ou le mouvement que fait un corps contre un autre corps, tantôt pour l’effet même qui réſulte de cet effort. Voyez Mouvement.

[En effet, dit d’Alembert, toute puiſſance n’eſt autre choſe qu’un corps qui eſt actuellement en mouvement, ou qui tend à ſe mouvoir, c’eſt-à-dire, qui ſe mouveroit ſi rien ne l’en empêchoit. Voyez Puissance. Or, dans un corps, ou actuellement mû, ou qui tend à ſe mouvoir, nous ne voyons clairement que le mouvement qu’il a, ou qu’il auroit, s’il n’y avoit point d’obſtacle : donc l’action d’un corps ne ſe manifeſte à nous que par ce mouvement : donc nous ne devons pas attacher une autre idée au mot d’action que celle d’un mouvement actuel, ou de ſimple tendance ; & c’eſt embrouiller cette idée que d’y joindre celle de je ne ſais quel être métaphyſique, qu’on imagine réſider dans le corps, & dont perſonne ne ſauroit avoir de notion claire & diſtincte. C’eſt à ce même mal-entendu qu’on doit la fameuſe queſtion des forces vives, qui, ſelon les apparences, n’auroit jamais été un objet de diſpute, ſi l’on avoit bien voulu obſerver que la ſeule notion préciſe & diſtincte qu’on puiſſe donner du mot de force, ſe réduit à ſon effet, c’eſt-à-dire, au mouvement qu’elle produit ou tend à produire. Voyez Force.

Quantité d’action, eſt le nom que donne M. de Maupertuis, dans les Mémoires de l’Académie des Sciences de Paris, 1744, & dans ceux de l’Académie de Berlin, 1746, au produit de la maſſe d’un corps par l’eſpace qu’il parcourt & par ſa vîteſſe. M. de Maupertuis a découvert cette loi générale, que dans les changemens qui ſe font dans l’état d’un corps, la quantité d’action néceſſaire pour produire ce changement, eſt la moindre qu’il eſt poſſible. Il a appliqué heureuſement ce principe à la recherche des lois de la réfraction, des lois du choc, des lois de l’équilibre, &c. & s’eſt même élevé à des conſéquences plus ſublimes ſur l’exiſtence d’un premier être. Les deux ouvrages de M. de Maupertuis que nous venons de citer, méritent toute l’attention des Philoſophes ; & nous les exhortons à cette lecture : ils y verront que l’auteur a ſu allier la métaphyſique des cauſes finales, (voyez Causes finales) avec les vérités fondamentales de la mécanique ; faire dépendre d’une même loi le choc des corps élaſtiques & celui des corps durs, qui juſqu’ici avoient eu des lois ſéparées, & réduire à un même principe les lois du mouvement & celles de l’équilibre.

Le premier mémoire où M. de Maupertuis a donné l’idée de ſon principe, eſt du 15 avril 1744 ; & à la fin de la même année, M. le Profeſſeur Euler publia ſon excellent livre : Methodus inveniendi lineas curvas maximi vel minimi proprietate gaudentes. Dans le ſupplément qui y avoit été ajouté, cet illuſtre géomètre démontre que dans les trajectoires que des corps décrivent par des forces centrales, la vîteſſe multipliée par l’élément de la courbe, fait toujours un minimum. Ce théorème eſt une belle application du principe de M. de Maupertuis au mouvement des planètes.

Par le mémoire du 15 avril 1744, que nous venons de citer, on voit que les réflexions de M. de Maupertuis ſur les lois de la réfraction, l’ont conduit au théorème dont il s’agit. On fait le principe que M. de Fermat, & après lui M. Leibnitz, ont employé pour expliquer les lois de la réfraction. Ces grands géomètres ont prétendu qu’un corpuſcule de lumière qui va d’un point à un autre, en traverſant deux milieux différens, dans chacun deſquels il a une vîteſſe différente, doit y aller dans le temps le plus court qu’il eſt poſſible : & d’après ce principe, ils ont démontré géométriquement que ce corpuſcule ne doit pas aller d’un point à l’autre en ligne droite, mais qu’étant arrivé ſur la ſurface qui ſépare les deux milieux, il doit changer de direction, de manière que le ſinus de ſon incidence ſoit au ſinus de ſa réfraction, comme ſa vîteſſe dans ce premier milieu eſt à ſa vîteſſe dans le ſecond ; d’où ils ont déduit la loi ſi connue du rapport conſtant des ſinus. Voyez Sinus, Réfraction, &c.

Cette explication, quoique fort ingénieuſe, eſt ſujette à une grande difficulté, c’eſt qu’il faudroit que le corpuſcule s’approchât de la perpendiculaire dans les milieux où ſa vîteſſe eſt moindre, & qui par conſéquent lui réſiſtent davantage : ce qui paroît contraire à toutes les explications mécaniques qu’on a données juſqu’à préſent de la réfraction des corps, & en particulier de la réfraction de la lumière.

L’explication, entr’autres, qu’a imaginée M. Newton, la plus ſatisfaiſante de toutes celles qui ont été données juſqu’ici, rend parfaitement raiſon du rapport conſtant des ſinus, en attribuant la réfraction des rayons à la force attractive des milieux ; d’où il s’enſuit que les milieux plus denſes, dont l’attraction eſt plus forte, doivent approcher le rayon de la perpendiculaire ; ce qui eſt, en effet, confirmé par l’expérience. Or, l’attraction du milieu ne ſauroit approcher le rayon de la perpendiculaire ſans augmenter ſa vîteſſe, comme on peut le démontrer aiſément : ainſi, ſuivant M. Newton, la réfraction doit ſe faire en s’approchant de la perpendiculaire lorſque la vîteſſe augmente ; ce qui eſt contraire à la loi de MM. Fermat & Leibnitz.

M. de Maupertuis a cherché à concilier l’explication de M. Newton avec les principes métaphyſiques. Au lieu de ſuppoſer avec MM. de Fermat & Leibnitz, qu’un corpuſcule de lumière va d’un point à un autre dans le plus court temps poſſible, il ſuppoſe qu’un corpuſcule de lumière va d’un point à un autre, de manière que la quantité d’action ſoit la moindre qu’il eſt poſſible. Cette quantité

d’action