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AUR

Il aſſure expreſſément qu’il avoit « vu ce même météore en Iſlande de ſes propres yeux ; que c’étoit, à la vérité, une lumière plus tranquille & plus continue, quoiqu’elle ne laiſſât pas quelquefois de ſe mouvoir avec impétuoſité, &c. » Cet hiſtorien parle, à la vérité, de la frayeur que cet objet avoit alors cauſé aux habitans de l’île : elle pouvoit être un effet des préjugés & de l’ignorance des cauſes de ſes feux, de ces jets de lumière, comme elle l’a été généralement dans des temps plus reculés, quoiqu’on vît ſouvent ce phénomène. Le peuple de l’Iſlande, au commencement de ce ſiècle, pouvoit bien reſſembler aux françois du ſixième, du huitième, du neuvième & du douzième ſiècle : la figure que donne Torfeus eſt tout-à-fait curieuſe.

Si quelques voyageurs, tels que Huyghens de Linsſchot, Frédéric Martens, Jean Wood ne parlent pas de ce phénomène, c’eſt qu’on ne parcourt les terres & les mers arctiques que dans certaines ſaiſons où les aurores boréales, ou ne paroiſſent pas ſenſiblement, ou ſe montrent avec moins d’éclat ; c’eſt que les meilleures desſriptions des pays ſont remplies d’omiſſions, & que l’attention que des voyageurs qui ne font ordinairement que paſſer dans des pays éloignés, dépend de leurs idées, de leur goûts, &c.

Par ces témoignages & par les ſuivans, je me hâte de le remarquer, je ne prétends point prouver que les aurores boréales reſplendiſſantes ſont perpétuelles ; mais ſeulement que les aurores boréales tranquilles paroiſſent aſſez conſtamment au nord & dans les contrées circonvoiſines.

M. Celſius convient, « qu’à en juger par la manière dont quelques hiſtoriens du nord ſe ſont exprimés ſur la lumière boréale, on ſeroit tenté de croire que cette lumière y eſt conſtante & perpétuelle. » Ce ſavant aſtronome, pendant ſon ſéjour à Tornes en Bothnie, avec les académiciens français, pour la meſure d’un degré du cercle polaire, obſerva quarante-ſix apparitions de l’aurore boréale, depuis le premier octobre 1736, juſqu’au 22 avril 1737, c’eſt-à-dire, dans l’eſpace de moins de ſept mois, ainſi qu’on peut le voir dans les Acta litteraria & ſcientiarum de Suède, 1737. Cet habile aſtronome ayant pris la réſolution de l’obſerver en Suède, trouva, au bout d’un petit nombre d’années, qu’elle y avoit paru trois cent ſeize fois.

Les aurores boréales ſont très-fréquentes en Iſlande, & plus fortes que celles qu’on voit communément ; elles ſe montrent dans cette iſle « ſur tous les rhumbs de la bouſſole, principalement méridional. On y voit un ſegment très-noir, qui jette de fortes colonnes de lumières. Les aurores boréales paroiſſent plus communément quand il fait ſec, quoiqu’on en ait vu auſſi pendant la pluie, ainſi qu’avant ou après. La lumière qu’elles répandent, eſt ſouvent teinte d’une couleur jaune, verte & pourpre » Voyez l’ouvrage de M. de Troïl ſur l’Iſlande.

Dans l’eſpace de moins de ſept mois, ainſi qu’on peut le voir dans les Acta litteraria & ſcientarum de Suède, 1737.

M. Anderſon, célèbre voyageur, nous donne, dans ſon Histoire naturelle de l’Iſlande, du Groënland, &c. (Tom. I, p. 229 ) une nouvelle preuve de la fréquence des apparitions de l’aurore boréale, pour les terres arctiques : « Il m’a toujours paru, dit-il, extraordinaire, que les plus anciens iſlandois, à ce qu’on m’a aſſuré, s’étonnent eux-mêmes des apparitions fréquentes des aurores boréales, diſant qu’autrefois on les voyoit dans leur iſle beaucoup plus rarement qu’aujourd’hui : « C’eſt qu’autrefois elles n’étoient ni connues comme aurores boréales, ni obſervées, ni conſignées dans l’hiſtoire comme à préſent, l’art de l’imprimerie n’exiſtant pas.

En général, les aurores boréales tenant à une cauſe qui a dû avoir lieu dans tous les temps, & qui devoit les déterminer à paroître du côté des régions ſeptentrionales, ainſi que nous le prouverons, ont dû ſe montrer de ce côté ; mais mille circonſtances ont pu empêcher que le récit de toutes leurs apparitions n’ait été transſis juſqu’à nous ; d’un autre côté, les obſervateurs n’ont preſque fait attention qu’aux aurores boréales reſplendiſſantes.

On a obſervé quelquefois, avant & après l’entrée du printemps, pluſieurs aurores boréales indéciſes, dont la matière eſt preſqu’également répandue ſur tout l’horiſon, & quelquefois vers le couchant ſeulement, ou même vers le midi. On en vit de ces dernières, le 9 janvier 1730, à dix heures du ſoir, qui s’étendoit préciſément à l’eſt-ſud-eſt avec des bandes claires & obſcures, & avec quelques rayons. Le 15 février de la même année, il en parut une à Genève, obſervée par M. Cramer ; à Marſeille, par le P. Laval ; à Beziers, par M. Bouillet : elle étoit remarquable par la zône lumineuſe & mouvante, couchée le long du zodiaque, & par pluſieurs autres circonſtances ; elle étoit en ce ſens toute méridionale, & par-là beaucoup plus remarquable, que le demi-grand cercle vertical de celle du 16 novembre 1729 qui, juſque-là, étoit unique. Hiſt. de l’Académie, 1730, p. 8. MM. Muſſchenbroek, Weidler ont vu auſſi des aurores méridionales ; on en a également aperçu à Montpellier.

De l’aurore méridionale. On a donné le nom d’aurore boréale au phénomène dont nous avons parlé juſqu’ici, parce qu’il a été premièrement obſervé dans l’hémiſphère ſeptentrional, & parce